A la une
J-7 avant le départ pour Cayenne. C’est le moment de terminer les préparatifs (enfin, d’essayer), afin de ne rien oublier et de faire en sorte que le départ se passe comme prévu.
Il y a un peu de gestion des ressources humaines… Faire en sorte que tous les membres de l’équipe civile arrivent en temps et heure, prévoir les lieux d’arrivée et les rendez-vous. Les deux guides brésiliens qui nous accompagneront, Edinho et Preto, sont encore dans la forêt, occupés à la collecte de la noix du Brésil. Ils devraient arriver sous peu à Macapá, on pourra enfin parler en direct et vérifier les questions d’équipement. William, le botaniste de Kew Gardens, est lui au fin fond de son Écosse natale, pas plus joignable que les deux Brésiliens (apparemment le réseau de téléphonie mobile rencontre des obstacles similaires dans les forêts d’Amazonie et dans les montagnes d’Écosse…). Heureusement, le 2e botaniste, Guillaume, est à Cayenne et lui est joignable. Tout le monde doit se retrouver le 1er juin à Cayenne. Croisons les doigts !
De leur côté, les légionnaires ont maintenant défini leur équipe, solide et expérimentée. 11 d’entre eux effectueront comme moi le parcours dans son intégralité (sur l’image les « chefs de section », « équipiers », « spécialistes forêt » et « transmissions »). J’ai pu échanger avec l’adjudant Christophe, qui les commandera. Il a défini avec une limpidité toute légionnaire la philosophie de notre marche : « pas de pitié »… On ne saurait être plus clair.
Il faut aussi terminer de caler la logistique : le rendez-vous avec les pilotes et les pirogues pour la remontée du Maroni (et prévoir essence, nourriture…), les détails des ravitaillements qui seront déposés par l’armée de l’air…
Le reste des préparatifs concerne le matériel. Tout d’abord définir exactement ce dont nous avons besoin et faire en sorte de l’avoir rapidement. Joie et bonheur, le groupe électrogène miniature (nécessaire pour approvisionner les équipements, notamment le GPS géodésique) est arrivé dans les temps ! Cela nous donnera l’assurance que nous pourrons bien travailler, utiliser l’ordinateur sans trop compter, etc. Mais cela aura aussi un revers : 10 kg de groupe et 2 litres d’essence par jour à prévoir. L’équipe va devoir porter lourd ! Nous comptons bien sûr sur la bonne volonté des légionnaires pour nous aider…
Il faut aussi être sûr d’emporter toutes les informations qui nous sont nécessaires. J’ai fait imprimer deux jeux de cartes, l’un basé sur la cartographie actuelle au 1/50 000e et un autre basé sur les travaux de la commission binationale des limites, qui est la carte officielle de la frontière. Il y a des incohérences entre les deux que nous pourrons vérifier : par exemple, une rivière, la crique, qui coule soit vers l’ouest, soit vers l’est, en fonction des cartes. Il faut vérifier ce point !
Je charge aussi mon PC de toute la documentation que j’ai sur la région. On ne sait jamais, autant avoir tout sous la main en cas de besoin. Il faut aussi configurer la liaison satellite, vérifier que le script programmé pour la cartographie en direct fonctionne comme il faut.
Il reste encore beaucoup de petites choses à trouver et à préparer, notamment par exemple le matériel pour les études botaniques, qui devra être inclus dans nos ravitaillements. Estimer la quantité de piles pour les appareils non rechargeables, etc.
Ensuite, il faut commencer à faire mon sac et affronter des choix déchirants qui renvoient Euripide et Sophocle à de la littérature pour enfants… Un panneau solaire pour pallier une défaillance éventuelle du groupe électrogène ? (non, pas de soleil sous la canopée) Un hamac de rechange au cas où ? (oui, je suis paranoïaque, et 900 g en plus !) Une ou deux chemises de réserve ? (je ne sais pas…) Deux ou trois choses pour varier les rations lyophilisées ? (Euh…) Combien de paires de chaussettes ? (j’en suis à trois mais je sens que je vais augmenter…)… Corneille, tu n’étais qu’un risible !
Le poids du sac est le juge implacable. Déjà 22 kg… et ce sans les 3 litres d’eau et les 7-10 kg d’alimentation… Sans, non plus, les équipements que j’aurai sur moi (machette, appareil photo, carnet, 2 GPS… au moins 3 kg). Il va falloir alléger !!
Après il y a la tentation, tous les gadgets que l’on a envie de tester dans la forêt « pour voir ». Mais à quoi bon si ça ne marche pas comme prévu ? Du coup mieux vaut s’en tenir au matériel éprouvé et testé… Mais que de tentations ! Je suis dans les magasins de matériel de randonnée comme un enfant dans les rayons de jouets à Noël… Bon, j’ai craqué pour une bâche ultralégère mais je promets que ce sera tout !
Dernier choix, bien sûr crucial : un peu de littérature pour relâcher l’esprit au bivouac de temps en temps. J’ai du mal à voyager sans Pléiade, même si c’est infiniment plus lourd qu’une petite liseuse électronique… Pas encore totalement arrêté mon choix, même si Camus tient la corde. Ou alors le 2e tome des romans de Hugo ?
Commentaires
Bouquin à emporter
berlherm le 2 Juin 2015 à 13h59Connectez-vous, rejoignez la communauté
du journal CNRS