Donner du sens à la science

A propos

Construire un terrain de partage et de discussion autour des secrets de l’organe le plus complexe et mystérieux du vivant : tel est le but de ce blog dédié au cerveau. Des chercheurs en neurosciences y décryptent les avancées les plus importantes et prodigieuses, et vous emmènent à la découverte du système nerveux, de ses fonctions et de ses mystères. Lire ici l'éditorial du blog.
  
Contact : Giuseppe Gangarossa, giuseppe.gangarossa@univ-paris-diderot.fr
Twitter : @PeppeGanga

Les auteurs du blog

Giuseppe Gangarossa et de nombreux chercheurs en neurosciences
Maître de conférences à l’université Paris Diderot et membre de l'Unité de biologie fonctionnelle et adaptative, Giuseppe Gangarossa anime ce blog qui fédère des spécialistes de tous les horizons des neurosciences.

A la une

L’image de la semaine : «Le poisson-zèbre, organisme modèle»
15.05.2017, par Alexandra Gros, chercheuse post-doctorante à l’université d’Edimbourg

Le poisson-zèbre ou Danio rerio est une espèce tropicale de poisson de la famille des Cyprinidés. L’adulte mesure entre 4 et 5 centimètres. Son corps est orné de teintes vives, métalliques et brillantes et il est composé de cinq bandes bleu acier longitudinales sur toute sa longueur. Alors que le mâle est plutôt élancé, la femelle est plus arrondie. Ce poisson se trouve naturellement, sous forme de petits bancs d’au moins une demi-douzaine d’individus, en Inde dans les rizières, les eaux stagnantes et les petits cours d’eau à faible courant. Le poisson-zèbre possède un des plus importants génomes pour un vertébré, avec 26 000 gènes codants, ce qui fait de lui un modèle de choix pour l’étude de la génétique.

Depuis la fin des années 1990, ce petit poisson est couramment utilisé en laboratoire comme organisme modèle car il possède de nombreux atouts. Un organisme modèle est une espèce non humaine étudiée en laboratoire de manière approfondie pour comprendre un ou des phénomènes biologiques. La physiologie d’un organisme modèle est proche de celles d’une ou de plusieurs autres espèces. Les observations d’un phénomène biologique tirées des investigations sur cette organisme modèle peuvent donc être, au moins partiellement, valables pour d’autres espèces, dont l’Homme. Ce transfert des connaissances d’une espèce à l’autre est rendu possible par l’origine commune de tous les organismes vivants, la conservation du métabolisme et une partie commune du patrimoine génétique au cours de l’évolution. Les organismes modèles permettent de faire des avancées importantes dans la compréhension des organismes vivants et servent comme outil de modélisation pour l’organisme humain, très complexe. Les organismes modèles permettent donc de réaliser plus simplement des études complexes ou impossibles sur d’autres espèces pour des raisons techniques et/ou éthiques. Néanmoins, les extrapolations d’un organisme à l’autre doivent être faites avec précaution car l’utilisation d’organismes modèles n’est pas sans limites et il n’existe aujourd’hui pas de substitut parfait à l’étude d’un organisme vivant aussi complexe que l’Homme.

Les avantages du poisson-zèbre sont nombreux ! Du fait de sa taille, il prend peu de place, son élevage est facile et ne coûte pas cher. Il se reproduit rapidement et en grand nombre, et son développement est uniforme entre les individus et rapide puisqu’il devient adulte en moins de trois mois. De plus, les embryons de ce poisson se développent hors de la femelle et ces petits poissons sont transparents dans les premiers stades de leur développement. Par ailleurs, il est possible de rendre le poisson-zèbre transparent à l’âge adulte via une mutation génétique, ce qui rend inutile toute chirurgie ou intrusion pour voir ce qu’il se passe à l’intérieur de l’organisme, et permet le suivi de cellules ou de molécules au sein et en interaction avec l’organisme. Pour finir, il est possible de modifier ce poisson en utilisant le génie génétique.
© King’s College of London/UCL Images
© King’s College of London/UCL Images

Cette image montre le cerveau et le début de la moelle épinière d’un embryon entier de poisson-zèbre, âgé de 4 jours, vu de dessus, dans laquelle l’expression de la glycoprotéine « synaptic vesicule protein 2 » est marquée afin de visualiser les axones en vert et l’expression de la protéine tubuline acétylée afin de visualiser le neuropile en rouge, une partie du tissu nerveux située entre les principales cellules constituent la substance grise du système nerveux central et qui comprend les axones, les dendrites et les synapses des neurones ainsi que les prolongements des cellules gliales, tous sauf les corps cellulaires.

Le poisson-zèbre est aussi bien utilisé dans le cadre de recherches fondamentales que dans la recherche appliquée. Il est utilisé aussi bien en immunologie, en cancérologie, en toxicologie qu’en neurosciences. Dans ce dernier domaine, le poisson-zèbre est utilisé pour l’étude du développement du système nerveux, de la rétine, de la perception sensorielle, mais aussi pour l’étude d’un certain nombre de troubles du système nerveux (autisme, schizophrénie, déficit de l’attention, lésions cérébrales, maladies neurodégénératives…), et il est particulièrement employé pour l’étude de la régénération neuronale suite à des lésions de la moelle épinière, puisque ce petit poisson présente d’étonnantes capacités de régénération. Notons néanmoins qu’avec environ 70 à 85% des gènes de l’Homme qui possèdent un équivalent chez le poisson-zèbre, ce modèle n’est pas suffisamment proche de l’Homme pour transposer directement les résultats obtenus sur ce poisson directement à notre espèce. Aujourd’hui, les chercheurs répertorient toutes les mutations génétiques observées chez ce poisson et leurs conséquences afin de créer une immense base de données accessibles à tous les chercheurs du monde pour les recherches actuelles et futures, fondamentales et appliquées, en vue de mieux comprendre un certain nombre de maladies. 
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Alexandra Gros est docteure en neurosciences (Institut des neurosciences Paris-Saclay). Au cours de sa thèse, elle s’est intéressée au rôle de la neurogenèse adulte hippocampique dans les processus d’apprentissage et de mémoire, notamment épisodique. Alexandra est actuellement chercheuse post-doctorante à l’université d’Édimbourg où elle étudie comment la mise en mémoire et la persistance de souvenirs d’événements de la vie courante peuvent être affectées par un apprentissage ultérieur. Pour cela, elle cherche à élucider les mécanismes moléculaires et cellulaires sous-tendant ces processus, notamment via des mécanismes de « tagging » des neurones et synapses en utilisant l’expression des gènes immédiats précoces.

Commentaires

0 commentaire
Pour laisser votre avis sur cet article
Connectez-vous, rejoignez la communauté
du journal CNRS