Donner du sens à la science

A propos

Construire un terrain de partage et de discussion autour des secrets de l’organe le plus complexe et mystérieux du vivant : tel est le but de ce blog dédié au cerveau. Des chercheurs en neurosciences y décryptent les avancées les plus importantes et prodigieuses, et vous emmènent à la découverte du système nerveux, de ses fonctions et de ses mystères. Lire ici l'éditorial du blog.
  
Contact : Giuseppe Gangarossa, giuseppe.gangarossa@univ-paris-diderot.fr
Twitter : @PeppeGanga

Les auteurs du blog

Giuseppe Gangarossa et de nombreux chercheurs en neurosciences
Maître de conférences à l’université Paris Diderot et membre de l'Unité de biologie fonctionnelle et adaptative, Giuseppe Gangarossa anime ce blog qui fédère des spécialistes de tous les horizons des neurosciences.

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L'image de la semaine: «Le ventre, notre deuxième cerveau»
14.02.2017, par Alexandra Gros, chercheuse post-doctorante à l’université d’Edimbourg
Cette semaine, le blog «Aux frontières du cerveau» vous invite à découvrir le système nerveux entérique, et ses nombreuses fonctions essentielles pour notre corps.

« Avoir la peur au ventre », « avoir l’estomac noué », « digérer une information » ou encore « prendre aux tripes », autant d’expressions qui traduisent le lien entre nos émotions et notre ventre. Et ce n’est pas pour rien ! En effet, au sein du système digestif, on trouve le système nerveux entérique (SNE), qui fait partie du système nerveux périphérique. Il est constitué d’environ 500 millions de neurones distribués le long du tube digestif, et composé de deux réseaux complexes : le plexus myentérique (ou d’Auerach) et le plexus sous-muqueux (ou de Meissner). Dans ces deux plexus, les cellules nerveuses sont organisées en réseaux denses connectés les uns aux autres sans autre structure particulière.

Ce SNE commande le péristaltisme, contractions qui, en se propageant d’un bout à l’autre du tube digestif, permettent d’assurer le transit. Il régule également les fonctions intestinales (motricité digestive, sécrétion hydroélectrolytique de la muqueuse ou de la circulation sanguine) et contrôle la barrière épithéliale intestinale. Cette dernière fonction est primordiale puisqu’elle permet le passage de nutriments à travers l’intestin tout en empêchant le passage des agents pathogènes ou toxiques dans le corps. De plus, le SNE entretient des relations étroites avec notre système immunitaire puisque le système digestif, en contact direct avec la flore digestive et le microbiote, concentre 70 à 80 % du système immunitaire.

Ce positionnement central du SNE, en contact à la fois avec le milieu extérieur et le milieu intérieur, lui confère une place de choix dans un grand nombre de fonctions de régulation. De façon globale, les messages nerveux en provenance des intestins supportent deux fonctions importantes : ils fournissent un « feedback » sensoriel aux systèmes locaux qui modulent en permanence l’activité motrice des différents viscères, et ils informent le cerveau des conditions ambiantes.   

Bien que le SNE soit en interaction avec les autres parties du système nerveux autonome, qui contrôle les fonctions involontaires (système nerveux sympathique et parasympatique), il fonctionne de façon indépendante des autres centres nerveux. La communication au sein du SNE est permise par une vingtaine de neurotransmetteurs, initialement mis en évidence dans le cerveau (sérotonine, acétylcholine, noradrénaline, glutamate, etc.). Il est connecté au système nerveux central via le nerf vague, qui joue un rôle fondamental dans la régulation végétative (digestion, fréquence cardiaque, fréquence respiratoire, etc.).

Par ailleurs, le nerf vague permet une communication permanente entre le cerveau et le SNE, et notamment des émotions. Par exemple, le stress ressenti par le SNE agit directement sur la muqueuse intestinale, provoquant la sécrétion de sérotonine, neurotransmetteur impliqué dans divers désordres psychiatriques (anxiété, dépression, agressivité, stress, sommeil, etc.) et produit à 95 % par les cellules nerveuses de l’intestin, qui agit ensuite sur notre cerveau. Comme le cerveau, le SNE peut également présenter des lésions spécifiques observées lors de maladies neurodégénératives qui peuvent entraîner par conséquent des manifestations digestives. L’étude du SNE, à travers l’examen de sa structure, de son fonctionnement, de ses interactions avec les différentes fonctions physiologiques, de son influence sur notre cerveau et de ses dysfonctionnements, représente un champ de recherche en pleine expansion qui présente des pistes thérapeutiques prometteuses pour certains troubles neurodégénératifs. Notre ventre n’a pas fini de nous étonner !

© Maxime Mahe – ENS UMR1235 
© Maxime Mahe – Inserm UMR 1235 TENS

Cette photo montre une acquisition en microscopie confocale d’une section de côlon de souris. En vert, sont marquées les fibres neuronales via le marquage de la protéine PGP9.5 ; en rouge, les corps neuronaux via le marquage de la protéine HuC/D et en bleu, les cellules gliales via le marquage de la protéine sox10. Dans cette image, les plexus neuronaux visibles correspondent au plexus myentérique qui est en majeur parti responsable de la motricité intestinale. Ces plexus contiennent les corps neuronaux de différents types de neurones et émettent des projections nerveuses dans les muscles lisses et longitudinaux afin de réguler les fonctions neuromusculaires du système digestif. Les cellules gliales sont présentes dans les plexus, mais également autour des fibres nerveuses, où elles assurent un support nourricier et structural et participent à la régulation de l’activité neuronale. 
  
  
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Alexandra Gros est docteure en neurosciences (Institut des neurosciences Paris-Saclay). Au cours de sa thèse, elle s’est intéressée au rôle de la neurogenèse adulte hippocampique dans les processus d’apprentissage et de mémoire, notamment épisodique. Alexandra est actuellement chercheuse post-doctorante à l’université d’Édimbourg où elle étudie comment la mise en mémoire et la persistance de souvenirs d’événements de la vie courante peuvent être affectées par un apprentissage ultérieur. Pour cela, elle cherche à élucider les mécanismes moléculaires et cellulaires sous-tendant ces processus, notamment via des mécanismes de « tagging » des neurones et synapses en utilisant l’expression des gènes immédiats précoces.

 

 

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