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Grande enquête « CNRS Le Journal »
Donner du sens à la science

Georges Charpak, 12 cm² d’histoire

Point de vue

Georges Charpak, 12 cm² d’histoire

23.02.2016, par
Le 29 février, La Poste met en circulation un timbre à l’effigie du Prix Nobel de physique Georges Charpak. Historien des sciences au CNRS, Denis Guthleben nous relate le parcours de ce scientifique d’exception qui fut aussi un pédagogue hors pair.

Le 29 février 2016, La Poste émet un nouveau timbre, en hommage au Prix Nobel de physique Georges Charpak (1924-2010). L’occasion de revenir sur une vie au cours de laquelle l’histoire des sciences, l’histoire de l’enseignement et l’Histoire tout court se sont croisées et télescopées, comme les particules de l’une des expériences chères au savant…
 

L’Histoire…

À tout seigneur, tout honneur : commençons par l’Histoire elle-même, la « grande », celle qui conduit un enfant de 7 ans à quitter avec ses parents sa Pologne natale. Nous sommes au début des années 1930, Hitler n’est pas encore au pouvoir et l’extermination systématique des Juifs d’Europe ne débutera qu’une décennie plus tard. Mais la misère et l’antisémitisme que celle-ci vient nourrir dans la jeune république polonaise poussent déjà bien des famil­les vers l’exil. « Heureux comme Dieu en France », annonce alors une expression yiddish.

Le 29 février 2016, La Poste émet un timbre en hommage à Georges Charpak.
Le 29 février 2016, La Poste émet un timbre en hommage à Georges Charpak.

Le jeune garçon le vérifie de lui-même : « Venu en France à l’âge de 7 ans, sans papier et sans parler ­français, j’ai cru arriver au paradis, confiera Georges Charpak a posteriori. Déraciné et apatride, j’y ai trouvé ma patrie et j’ai sans difficulté partagé avec mes camarades de classe la ­plupart des héros français qui vous donnent la fierté d’appartenir à ce pays. » Des mots qui font chaud au cœur et qui, ­aujourd’hui encore, aujourd’hui surtout, résonnent d’un écho par­ti­culier. C’est la même Histoire en majuscules qui le conduira sous l’Occupation à défendre sa nouvelle patrie, en s’engageant dans la Résistance et en connaissant, en 1944, les affres de la déportation.

… la Science…

À côté de la grande Histoire, celle des sciences pourrait presque paraître anodine. Mais le parcours et l’œuvre de Georges Charpak viennent d’emblée balayer cette impression. Diplômé de l’École des mines en 1947 – il plaisantera souvent au sujet de sa condition de « mineur polonais » –, le chercheur est ensuite associé aux plus grandes institutions scientifiques françaises et internationales : le CNRS, qui le recrute en 1948 et l’affecte au laboratoire de Frédéric Joliot-Curie au Collège de France ; le Cern, qu’il rejoint à la fin des années 1950 et qu’il ne quittera qu’à sa retraite en 1989 ; l’Académie des sciences, où il fait son entrée en 1985…

Après l’obtention
de son prix Nobel,
il s’est consacré
corps et âme
à l’apprentissage
de la science
aux enfants.

Trajectoire exceptionnelle pour un physicien d’exception : après avoir brillamment soutenu sa thèse en 1954 devant un jury prestigieux – Irène et Frédéric Joliot-Curie, Alfred Kastler et Francis Perrin, rien de moins –, Georges Charpak s’éloigne de la physique nucléaire au profit d’une physique des particules alors naissante et qui le passionne. Il y montre un talent hors norme dans la conception et la réalisation de détecteurs, et s’illustre entre autres – entre beaucoup d’autres, car ses travaux ont une importance capitale pour toute la physique des particules du demi-siècle écoulé – avec l’invention de la célèbre « chambre multifils ». Celle-ci lui vaut, en 1992, son prix Nobel de physique.

Georges Charpak
Georges Charpak à côté d'un détecteur de particules.
Georges Charpak
Georges Charpak à côté d'un détecteur de particules.

… et l’École

Certains voient le Nobel comme une consécration. Pour Georges Charpak, il ne s’agit que d’une étape. La suivante se résume en cinq mots : « La main à la pâte ». En s’inspirant de l’exemple à Chicago de son collègue et ami Leon Lederman, nobélisé quatre ans plus tôt, il se consacre corps et âme à l’apprentissage de la science aux enfants, au travers de cette initiative qui les détourne du tableau noir pour les accompagner sur le chemin du raisonnement, de l’expérimentation et, au-dessus de tout, de l’imagination. Une manière, et quelle manière !, pour Georges Charpak de payer sa dette à celle qui lui a mis le pied à l’étrier, soixante ans plus tôt, alors qu’il ne bredouillait que quelques mots de français : l’école de la République.

Le timbre dédié aujourd’hui à Georges Charpak mesure 40,85 millimètres sur 30… soit 12 et quelques centimètre carrés. On ne peut que saluer La Poste d’avoir songé à rendre hommage à Georges Charpak, et d’être parvenue à faire tenir un aussi grand bonhomme sur un si petit bout de papier !

      
             
Les points de vue, les opinions et les analyses publiés dans cette rubrique n’engagent que leur auteur. Ils ne sauraient constituer une quelconque position du CNRS.

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