Donner du sens à la science

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Le 28 mai 2016, la goélette scientifique Tara quitte son port d’attache de Lorient pour sillonner l’océan Pacifique sur près de 100 000 km afin d'étudier la biodiversité des récifs coralliens et leur évolution. Suivez sur ce blog cette formidable aventure scientifique, soutenue notamment par le CNRS, et jour après jour sur le site de Tara  et sur sa page facebook.

 

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«Réchauffement et tropicalisation des zones tempérées»
14.04.2017, par Noëlie Pansiot
Un grain de sable dans le rouage et toute la machine s’enraye. Le changement climatique entraîne des bouleversements sur l’ensemble des écosystèmes. Le troisième volet scientifique de la mission japonaise de Tara s’intéressera à l’un de ces phénomènes : le déplacement des espèces. Zoom sur la présence de nouveaux prédateurs à nageoires.

Du fait de sa position géographique, le Japon connaît d’importantes variations de températures du nord au sud de l’archipel. C’est ce que les scientifiques appellent le « gradient de températures ». Les paysages sous-marins diffèrent selon les latitudes. Au Nord, les macro-algues, comme les laminaires, ont longtemps dominé sous la surface. Au Sud, dans l’archipel de Ryukyu, les récifs coralliens façonnent des reliefs sous-marins. Mais le réchauffement climatique, qui ne connaît pas de frontières, impacte chaque écosystème.

À Shikine, une île au sud de Tokyo, l’équipe Tara a observé les effets de l’acidification de l’océan.
À Shikine, une île au sud de Tokyo, l’équipe Tara a observé les effets de l’acidification de l’océan.

Et les coraux ne sont pas les seuls à souffrir de l’augmentation des températures. Les algues présentes dans les eaux tempérées sont affaiblies par le réchauffement et le nombre croissant de prédateurs arrivés grâce aux températures favorables.

Depuis une vingtaine d’années, les scientifiques observent un déplacement d’espèces de poissons tropicaux ou subtropicaux, du sud vers le nord, en corrélation avec l’augmentation des températures de l’océan. Certains poissons n’ont plus à craindre une eau trop froide et arrivent dans des zones qu’ils n’avaient encore jamais colonisées. « Lorsqu’il fait plus chaud, on observe aussi un phénomène physiologique chez ces poissons : ils se nourrissent plus », explique Sylvain Agostini, coordinateur scientifique au Japon. Plus nombreux et plus affamés, ces herbivores à écailles contrôlent la quantité d’algues présente dans l’écosystème. Face à une pression croissante, les laminaires perdent du terrain.

« Dans le futur, ces poissons seront capables de monter à des latitudes encore plus élevées et peut-être même de créer de l’espace pour les coraux, en éliminant les algues. Mais attention au compagnon diabolique du changement climatique : l’acidification des océans ! On peut imaginer que l’augmentation des températures soit favorable au déplacement des coraux dans les régions les plus septentrionales du Japon. À ceci près que tous les paramètres ne corroborent pas. Si l’augmentation des températures permet la croissance des coraux, à l’inverse l’acidification de l’eau limite le développement de leur squelette. Ces deux paramètres antagonistes ne nous permettent pas de prévoir ce qui se passera dans le futur », explique Sylvain Agostini.

Plus au sud, à Yokunami (près de Kochi), les scientifiques collectent des données sur le phénomène de tropicalisation.
Plus au sud, à Yokunami (près de Kochi), les scientifiques collectent des données sur le phénomène de tropicalisation.

Le phénomène de tropicalisation des écosystèmes tempérés sera étudié par les Taranautes ce mois-ci, le long des côtes japonaises et surtout à Kochi, qui fait figure d’exemple mondial. « La baie dans laquelle nous allons plonger est extrêmement intéressante, poursuit le coordinateur scientifique. D’un côté de la baie, l’écosystème d’origine, dominé par les algues, est toujours présent. De l’autre, nous observons une tropicalisation radicale et les laminaires ont été remplacées par les coraux. Pourquoi ? C’est que ce nous essaierons de comprendre grâce aux données collectées à bord de Tara. »

Cet article a été publié sur le site de Tara Expéditions.

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du journal CNRS