Donner du sens à la science

A propos

Construire un terrain de partage et de discussion autour des secrets de l’organe le plus complexe et mystérieux du vivant : tel est le but de ce blog dédié au cerveau. Des chercheurs en neurosciences y décryptent les avancées les plus importantes et prodigieuses, et vous emmènent à la découverte du système nerveux, de ses fonctions et de ses mystères. Lire ici l'éditorial du blog.
  
Contact : Giuseppe Gangarossa, giuseppe.gangarossa@univ-paris-diderot.fr
Twitter : @PeppeGanga

Les auteurs du blog

Giuseppe Gangarossa et de nombreux chercheurs en neurosciences
Maître de conférences à l’université Paris Diderot et membre de l'Unité de biologie fonctionnelle et adaptative, Giuseppe Gangarossa anime ce blog qui fédère des spécialistes de tous les horizons des neurosciences.

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L'image de la semaine: «Le cerveau vu à travers les organes»
06.02.2017, par Alexandra Gros, post-doctorante à l’université d’Edimbourg
Entouré d'organes, le cerveau était difficile à observer en entier avec les techniques d'imagerie classique. Le dispositif mis au point par un laboratoire allemand permet de voir à travers les tissus et de visualiser les cellules nerveuses au sein-même de l’organisme avec une précision sans précédent.

L’observation anatomique du système nerveux dans son état le plus physiologique possible reste limitée par le fait qu’il se situe au sein de l’organisme, entouré d’organes, donc difficilement accessible pour l’observation directe, notamment à un niveau cellulaire. L'anatomie à l'échelle cellulaire du système nerveux est donc analysée principalement via des coupes qui permettent d’observer son organisation au niveau cellulaire, mais uniquement à un niveau anatomique donné. Le développement de l’imagerie à résonnance magnétique dans la deuxième moitié du XXe siècle a permis d’observer plus précisément l’anatomie du système nerveux dans son environnement ainsi que son fonctionnement grâce à l’IRM fonctionnelle. Néanmoins, seuls les grandes structures anatomiques sont observables grâce à ces techniques et il n’est aujourd’hui pas possible de visualiser les cellules qui composent le système nerveux et d’observer les connections entre elles.

Une nouvelle technique développée par un laboratoire allemand est en train de rendre cela possible. Ali Ertürk et ses collègues de l'université Ludwig Maximilians de Munich, en Allemagne, ont mis au point un dispositif qui permet de voir à travers les organes et de visualiser les cellules au sein de l’organisme avec une précision sans précédent. Cette technique, nommée uDISCO pour Ultimate DISCO, permet d’enlever les lipides et les pigments des tissus d’un animal mort en utilisant des solvants organiques afin de les rendre transparents tout en les gardant structurellement intacts, que ce soit au niveau macroscopique ou microscopique. De plus, elle rend l’animal jusqu’à 65 % plus petit, rendant possible l’observation de l’individu entier avec un microscope classique en une seule fois et la cartographie des connexions nerveuses ou du système vasculaire sur une longue distance.

Par ailleurs, cette technique conserve les protéines fluorescences potentiellement présentes au sein des tissus, telles que la GFP exprimée dans des cellules particulières, et révèle certains tissus ou certaines parties de tissus (voir le billet « les 100 couleurs du Brainbow »). Cette méthode a, notamment, permis de dévoiler le système nerveux grâce à l’expression de la GFP dans les cellules nerveuses. Cerise sur le gateau : uDISCO est compatible avec l’utilisation de vecteurs viraux permettant l’expression de protéines fluorescentes au sein d’un tissu ou d’une population de cellules données, ce qui ouvre de nouveaux champs d’exploration de l’anatomie du système nerveux, mais également la compréhension des processus cognitifs et le suivi de potentiels traitements des maladies neurodégénératives.

//dx.doi.org/10.1038/nmeth.3964 (2016)), copyright (2016)
© Ali Ertürk – Reprinted by permission from Macmillan Publishers Ltd: Nature Methods (Nature Methods http://dx.doi.org/10.1038/nmeth.3964 (2016)), copyright (2016) 

Cette photo montre, à travers l’organisme entier, le cerveau d’un animal exprimant la protéine fluorescente GFP au sein du système nerveux. Chaque cellule du cerveau est visible en vert au sein des différentes structures de celui-ci, permettant ainsi de visualiser l’organisation et les connections cellulaires directement au sein de l’organisme.

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Alexandra Gros est docteure en neurosciences (Institut des neurosciences Paris-Saclay). Au cours de sa thèse, elle s’est intéressée au rôle de la neurogenèse adulte hippocampique dans les processus d’apprentissage et de mémoire, notamment épisodique. Alexandra est actuellement chercheuse post-doctorante à l’université d’Édimbourg où elle étudie comment la mise en mémoire et la persistance de souvenirs d’événements de la vie courante peuvent être affectées par un apprentissage ultérieur. Pour cela, elle cherche à élucider les mécanismes moléculaires et cellulaires sous-tendant ces processus, notamment via des mécanismes de « tagging » des neurones et synapses en utilisant l’expression des gènes immédiats précoces.