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Y voir plus clair sur le climat, c'est l'objectif de ce blog lancé à l'occasion de la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP21).

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La rédaction de CNRS Le Journal
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Les maths pour le climat
21.10.2015, par Didier Bresch
Alors que les politiques vont bientôt se presser au chevet de la planète lors de la COP21, quel est le rôle des mathématiques pour comprendre les phénomènes et protéger la Terre ?

Actuellement, nous devons faire face à des changements globaux environnementaux toujours plus rapides et brutaux, notamment en lien avec l'évolution du climat. Répondre aux nouveaux défis nous impose de prendre en considération des systèmes très complexes, où l’impact des activités humaines ne peut pas être négligé et où les problématiques font intervenir différentes échelles de temps et d'espace : micro-échelle (nuage, tornade…), échelle synoptique (dépressions, anti-cyclones, courants océaniques…), échelle intermédiaire dite méso-échelle, etc. Ils nécessitent aussi la prise en compte de divers processus (atmosphériques, continentaux et océaniques) et font apparaître des changements d'état brutaux, comme par exemple la transition solide/fluide en glaciologie ou la dynamique de rupture (crevasse, vêlage).

Les sciences environnementales sont, en fait, comme les mathématiques : elles nécessitent encore et toujours une recherche fondamentale pour mieux comprendre les processus, pour « simplifier » et formaliser ce que nous percevons du monde extérieur. C’est le travail de théoriciens en physique, chimie, biologie, économie, mécanique par exemple, qui construisent des modèles (modèles physiques à l'échelle, analogiques ou hors échelles ou modèles numériques). Bien que leur approche soit différente, ces modélisateurs font un travail très proche des mathématiques.

Les mathématiques ont une place importante parmi les sciences destinées à mieux comprendre certains phénomènes et à participer à la protection de notre planète et de sa biodiversité. Des initiatives en ce sens ont déjà été lancées, notamment les Mathématiques de la planète Terre (MPT) en 2013, qui se sont poursuivies l’année suivante sous l’égide de l’UNESCO, et pour laquelle une centaine de centres ou d’instituts de recherche et de sociétés savantes mathématiques du monde entier se sont unis. Mais dans un but d’accomplissement de la mission d’exploration et de protection de la planète, cette discipline doit être de plus en plus associée aux études : modéliser mathématiquement doit faire partie du panel d’outils dans le cadre d’une étude multi-disciplinaire.

La modélisation mathématique (théorique ou numérique) apparaît particulièrement lorsqu’il s’agit de gérer les interactions. Par exemple, différentes échelles de temps sont à prendre en compte en écologie théorique, dans le cas des dynamiques écologiques et évolutionnaires ou pour la représentation de différentes échelles de la biodiversité (individus, populations, espèces, communautés...) et leur lien avec l’évolution climatique. La séparation des échelles faite jusqu’à maintenant n’est plus possible compte tenu du raffinement des processus et de la nécessaire prise en compte du couplage terre-océan-atmosphère-cryosphère.

© C. FRESILLON/CNRS PHOTOTHEQUE

Un phénomène peut être modélisé de manière macroscopique déterministe. C'est-à-dire, mis en équations ou en systèmes d'équations, sans prise en compte de l'aléa, en associant des quantités calculables (vitesse de propagation d'un virus, etc.), en développant des algorithmes de simulation pour prédire certains comportements sur différentes échelles de temps, à partir de données observées, et en construisant des outils statistiques permettant de prédire et quantifier différents scénarios. Mais à partir de quelle échelle quantitative est-ce cohérent ? Il existe par ailleurs des fluctuations aléatoires, qui peuvent avoir un rôle très important à jouer pour décrire des comportements en temps longs. À partir de quelle échelle doit-on en tenir compte ?

Comprendre les phénomènes en lien avec le climat pour mieux protéger passe aussi par l’analyse de données : savoir analyser des données massives ou encore inférer des modèles à partir de jeux de données réduits. Par exemple, extraire la dynamique des structures cohérentes des images satellites requiert des avancées sur l’interpolation optimale dynamique, le traitement d’image et l’assimilation de données, ainsi que de nouveaux outils d’analyse géométrique. Au vu de la complexité des phénomènes mis en jeu, des liens scientifiques multi-disciplinaires se tissent de plus en plus avec les mathématiques (par le biais notamment de l’axe numérique) et il faut l’encourager fortement si l’on désire à terme mieux protéger. Des propositions sont d’ailleurs avancées au sujet de ce qu’il est important de faire pour plus d’efficacité.

On a entendu beaucoup de choses sur la rigueur de la discipline mathématique, qui en font souvent une discipline malheureusement boudée par la plupart. Mais peu de gens savent que le mathématicien est, en même temps, souple, ouvert et qu'il s'intéresse depuis bien longtemps à la planète.

Didier Bresch est directeur de recherche CNRS au Laboratoire de mathématiques de l'université de Savoie (Unité CNRS/université Savoie Mont Blanc)