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Que pensez-vous de l’accord de Paris sur le climat ?
Je pense que l’accord est historique car pour la première fois tout le monde a admis que l’homme est en train de bouleverser le système climatique terrestre. L’accord devrait permettre de changer radicalement notre réponse au changement climatique car il propose une approche bottom-up – partant de la société civile- qui dépasse la démarche top-down adoptée jusqu’ici et qui s’appuyait avant tout sur les décisions gouvernementales. Je suis convaincu que la société civile est prête à faire un effort, et que c’est également le cas des ONG, des fondations philanthropiques et des investisseurs.
Avec le système proposé de contrôle et de révision à la baisse des objectifs d’émissions pour chaque pays tous les cinq ans, les citoyens seront en mesure de faire pression sur leur gouvernement pour limiter l’augmentation des températures à 2°C, voire 1,5°C. Ce mécanisme est nouveau et il a pu être mis en place grâce à la diplomatie française, qui s’est beaucoup investie pour assurer le succès de cette COP21. En raison des attentats de novembre, il n’y a pas eu beaucoup de touristes dans la capitale française ces dernières semaines, mais la plupart des acteurs impliqués dans l’avenir climatique de notre planète sont venus à Paris : je n’avais jamais vu une telle mobilisation. Comme l’a dit Bono le 7 décembre « Everybody is in Paris ! ».
On met souvent en exergue les aspects négatifs de notre société mais l’accord de Paris nous rappelle que l’Humanité n’est pas seulement mue par l’égoïsme et l’argent, mais peut aussi jouer collectif. Nous sommes capables de travailler ensemble et d’utiliser notre créativité pour trouver les bonnes solutions.
Selon vous, les scientifiques ont-ils été entendus ?
Je fais partie des scientifiques impliqués dans la Plateforme Ocean Climat (www.ocean-climate.org) qui avait pour objectif de « donner une voix » aux océans. Je peux dire que nous avons été très bien entendus, aussi bien au niveau du gouvernement français que de l’UNFCCC (Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques).
La mention, pour la première fois, de l’océan comme un écosystème essentiel pour le climat est une victoire symbolique pour tous les défenseurs passionnés de la mer. Ces derniers ont en effet travaillé d’arrache-pied pendant deux ans pour créer la dynamique nécessaire à cette reconnaissance. Il faut toutefois reconnaître que l’impact des COP sur l’augmentation du taux CO2 atmosphérique au cours des cinquante dernières années a été nul. Les scientifiques doivent continuer à travailler et plaider auprès des politiques. Quant à la science, elle doit encore découvrir les techniques qui permettront de séquestrer la CO2 de manière efficace et de décarboner durablement nos sociétés.
Né en Grande Bretagne, Chris Bowler est un microbiologiste spécialisé dans l’étude des plantes et des algues. Il mène depuis plusieurs années des recherches sur les plantes terrestres afin de déterminer les leviers moléculaires qui contrôlent leurs réponses à la lumière. Dans son laboratoire de l’ENS, il décortique également les génomes des diatomées et les processus cellulaires physiologiques qui les distinguent. En effet, ces algues unicellulaires -constituant majeur du phytoplancton - jouent un rôle primordial dans l’équilibre des écosystèmes marins : leur production primaire de matière organique et d’oxygène équivaut celle de toutes les forêts tropicales. Grâces aux milliers d’échantillons collectés par l’expédition Tara Oceans, Chris Bowler tente maintenant de cerner la distribution et le rôle des algues planctonique dans les océans. Et ainsi étudier la réaction au changement climatique d’un organisme situé à la base de la chaîne alimentaire de l’océan. Chris Bowler a reçu la médaille d'argent du CNRS en 2010 et le grand prix scientifique de la Fondation Louis D de l'Institut de France en 2015.
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du journal CNRS