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De la santé à l’énergie en passant par l’informatique ou la chimie, les recherches menées dans les labos trouvent régulièrement des prolongements dans le monde socio-économique. Découvrez sur ce blog des exemples de valorisation des recherches menées au CNRS, une des institutions les plus innovantes au monde.

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Yvon Maday: «Transformer les inventions mathématiques en innovations»
17.09.2018, par Mathieu Grousson
L’Iciam, qui récompense des travaux en mathématiques appliquées, vient de dévoiler son palmarès 2019. Lauréat du prix Pioneer, Yvon Maday nous parle de ses travaux sur la modélisation et la simulation de phénomènes réels, qui ont abouti à de nombreuses innovations allant de la médecine à l’industrie.

Le Laboratoire Jacques-Louis Lions1 est à l’honneur cette année puisque vous et votre collègue Claude Bardos faites partie des lauréats de l’Iciam. Pour votre part, vous venez de recevoir le prix Pioneer pour votre rôle déterminant dans l’introduction de méthodes pour la modélisation et la simulation numérique. Quel est précisément votre apport ?
Yvon Maday : Je suis spécialiste d’analyse appliquée, plus précisément en analyse numérique. Mon activité consiste à proposer de nouvelles approches pour la simulation de problèmes associés à un phénomène réel et posés sous la forme d’un modèle mathématique, sur des ordinateurs de grande taille. Ces modèles peuvent s’exprimer de multiples façons : équations aux dérivées partielles, équations intégrales ou autre, et proviennent a priori de n’importe quel champ disciplinaire. Au cours de ma carrière, mes contributions ont trouvé des applications aussi variées que la modélisation du flux sanguin, l’optimisation de processus industriels ou la conception mécanique.

Yvon Maday
Yvon Maday

 
Pouvez-vous nous donner un exemple de vos réalisations ?
Y.M. : Depuis le début des années 2000, je m’intéresse par exemple à la manière dont on peut tirer parti d’ordinateurs de plus en plus massivement parallèles pour résoudre un problème. Très simplement, si vous avez 1 000 problèmes à résoudre et 1 000 processeurs indépendants, la solution est triviale. En revanche, si vous avez 1 000 processeurs mais un seul problème à résoudre, la question se pose de savoir comment découper ce dernier pour qu’il soit résolu sur les 1 000 processeurs simultanément (on dit « en parallèle ») plutôt que sur un seul. Question que nous avons abordée par l’introduction de nouvelles approches entrant dans le cadre des méthodes de « décomposition de domaines ».
 
Avec quelles applications ?
Y.M. : Avec des collègues mathématiciens, nous avons par exemple collaboré avec des chimistes sur le développement d’un code de simulation de la dynamique moléculaire, appelé Tinker-HP. La décomposition en sous-tâches des calculs à effectuer que nous avons proposée a permis de multiplier par 1 000 la vitesse d’exécution du code. Pour ce travail d’équipe, nous avons reçu le prix Atos – Joseph Fourier 20182.

À la clé, on peut citer une très belle simulation du ribosome3, avec plus de 3 millions d’atomes sur une durée suffisante pour commencer à observer certaines propriétés d’intérêt biologique. Et d’ici à quatre ans, nous avons l’objectif de simuler la fixation d’une protéine sur le cytoplasme4, soit 100 millions d’atomes, pour des applications à la génomique et à la médecine personnalisée.

Plus récemment, nous avons étendu cette notion de calcul parallèle pour la prévision en temps futur. Par exemple, alors que dans un schéma classique, la prévision météo est séquentielle : on calcule le temps à J+1, puis à J+2, et ainsi de suite jusqu’à J+7, notre approche permet de calculer simultanément la prévision à 7 jours sur 7 processeurs.

Ces méthodes n’ont pas encore été traduites dans un produit industriel, mais pour y parvenir une thèse est en cours au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives dans le cadre d’un projet de l’Agence nationale de la recherche.

Modélisation du Ribosome.
Modélisation du Ribosome.
 

L’innovation est-elle pour vous une finalité ?
Y.M. : C’est en effet le sens de mon activité. Ainsi, j’ai été amené à collaborer aussi bien avec des grandes entreprises, parmi lesquelles EDF, la RATP, Alstom ou L’Oréal, qu’avec des PME et des start-up. À cet égard, j’ai proposé un projet d’Institut Carnot pour la promotion de collaborations entre les mondes académique et industriel dans le champ de la modélisation, de la simulation, de l’optimisation et de la science des données (« big data »). Validé en 2016, il est sous ma direction depuis l’année dernière avec pour objectif de transformer les inventions mathématiques en innovations.
 
Quelles formes prennent ces collaborations ?
Y.M. : Avec nos chercheurs et nos ingénieurs de recherche, nous proposons aux entreprises une combinaison d’outils incluant modélisation, simulation, science des données et intelligence artificielle, pour les aider à optimiser et/ou concrétiser un projet. Pour des raisons de confidentialité, je ne peux pas être très disert, mais nous avons, par exemple, collaboré avec deux start-up d’une part pour un projet de gestion de l’énergie et d’autre part pour la robotisation d’un procédé industriel.
 
Qu’est-ce qui finalement vous motive le plus ?
Y.M. : Mon objectif de numéricien est de proposer les simulations les plus précises et les plus rapides possible, et dont le résultat soit de plus certifié. En ce sens, je suis réellement un mathématicien avec un goût prononcé pour l’abstraction. Pour autant, cela n’a de sens pour moi que dans la perspective de répondre à une question concrète au sein d’équipes pluridisciplinaires.

Retrouvez le palmarès 2019
 

Notes
  • 1. Unité CNRS/université Paris-Diderot/Sorbonne Université/Inria.
  • 2. Récompense les travaux réalisés dans les domaines de la simulation numérique, de l’intelligence artificielle et du calcul quantique.
  • 3. Le ribosome déchiffre le code de L’ARN messager, duplication d’un brin d’ADN, pour synthétiser les protéines.
  • 4. Ensemble des éléments situés à l'intérieur de la cellule, à l'exclusion du noyau, qui lui permettent d’assurer ses fonctions.

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