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Alors que l’Unesco vient de lancer la Décennie pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030), découvrez sur ce blog un aperçu de la diversité des recherches menées au CNRS sur l’océan.
 

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Ce blog collaboratif rassemble des contributions issues des 10 instituts thématiques du CNRS.

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De l’impact des sources hydrothermales sur l’océan de surface
05.10.2021, par Cécile Guieu, Laboratoire d'océanographie de Villefranche (LOV)
Mis à jour le 05.10.2021
En 2019, l’expédition océanographique TONGA, conduite dans le sud-ouest Pacifique, a cherché à élucider un mystère soulevé lors d’une campagne précédente : la présence de floraisons intenses de phytoplancton dans cette zone. Les eaux éclairées de l’océan auraient-elles pu être fertilisées par les éléments chimiques issus de l’hydrothermalisme ? Une hypothèse que la campagne TONGA avait pour objectif de confirmer ou d’infirmer.

Vaste, profond, et parfois hostile à l’Homme, l’océan n’est encore que très partiellement exploré. Parce qu’elles nourrissent les connaissances fondamentales, les expéditions océanographiques s’avèrent cruciales pour comprendre comment fonctionne l’océan et comment le changement climatique fait évoluer ce fonctionnement. Et si toute mission océanographique est montée pour répondre à une question scientifique précise… cette dernière est souvent soulevée par les résultats acquis au cours d’une précédente expédition. C’était le cas pour l’expédition TONGA, qui a découlé de découvertes établies au cours de la campagne OUTPACE en 2015. Pendant cette campagne, nous avions mesuré dans le sud-ouest Pacifique, de très fortes concentrations en fer, un élément chimique indispensable à la vie et donc au développement du phytoplancton. De si fortes concentrations en fer, inhabituelles dans la plupart de l’Océan, pourraient être issues de sources hydrothermales peu profondes et donc expliquer la présence de floraisons intenses de ce phytoplancton au milieu d’un désert marin. Il fallait donc confirmer cette hypothèse. La question de la présence et de l’origine de cet élément chimique n’est pas anodine. Celui-ci influence ce qu’on appelle la pompe biologique à carbone de l’océan et, par voie de conséquence, le climat.

Image satellite de la « couleur de l’océan » pendant l’expédition : plus les zones sont riches en chlorophylle, plus les couleurs sont chaudes. La zone d’intérêt à l’ouest de l’arc des Tonga est riche en chlorophylle : c’est la cause de ces floraisons qui a été étudiée pendant l’expédition océanographique.
©NASA

Monter le projet, obtenir le temps-navire, constituer l’équipe internationale et rechercher les fonds nécessaires … La préparation de l’expédition a duré 3 ans ! Avec à son bord une trentaine de scientifiques et autant de marins, l’Atalante a parcouru quelque 6000 km dans le sud-ouest Pacifique, pour comprendre si les éléments chimiques issus de l’hydrothermalisme peuvent fertiliser les eaux éclairées de l’océan. 37 jours en mer, sans escale, pour étudier cette pompe biologique à la fois au cœur de l’oasis, et à l’extérieur de celui-ci, dans ce désert marin que constitue l’immense gyre sud-Pacifique. Y travaillèrent de concert une équipe pluridisciplinaire en mer et à terre : océanographes (chimistes, biologistes et physiciens), atmosphériciens et géologues.

La première quête a été de trouver une zone cible, une source hydrothermale peu profonde, et de mesurer l’ensemble des paramètres qui peuvent permettre de faire le lien de causalité entre ces émissions et l’activité biologique en surface. La chance fut au rendez-vous : le premier site que nous avons ciblé s’est révélé être un parfait laboratoire naturel pour travailler sur notre hypothèse, avec des émissions hydrothermales fortes à 200 m de profondeur et arrivant jusqu’à la surface.
 Floraison du phytoplancton « trichodesmium »:  c’est ce type d’algues que nous avons étudié pendant l’expédition. Elles sont très friandes en fer et prolifèrent à l’ouest de l’Arc des Tonga
©Jérôme Jambou

Chaque jour, des dizaines d’opérations se sont succédé à bord : mise à l’eau d’instruments de prélèvements (eau, plancton, matière particulaire en train de sédimenter dans la colonne d’eau et aussi sédiments profonds) et de mesures directes par des capteurs optiques attachés aux instruments de prélèvements. Un grand nombre de paramètres biologiques et chimiques ont également été mesurés grâce à des prélèvements en continu dans la basse atmosphère et dans les eaux de surface. En plus de ces travaux conduits pendant la campagne, des robots sous-marins ont été largués qui continueront pendant des années à communiquer des paramètres permettant de contextualiser les résultats acquis pendant l’expédition. Un mouillage fixe a également été largué afin de collecter pendant une année la matière qui s’exporte vers le fond. Afin de permettre tous ces travaux simultanément, nous avions installé 4 container-laboratoires qui nous ont permis de travailler dans les meilleures conditions bien que sur un navire. Ainsi, dans un container dédié, nous avons pu conduire des expériences en mélangeant de l’eau collectée en surface à de l’eau collectée au niveau de la source hydrothermale : on a ainsi pu suivre la réponse biologique des organismes de surface en fonction des différentes proportions de chacune des eaux. Par manque de place pour installer les instruments de mesure, peu d’analyses sont en général réalisées à bord et plusieurs centaines de kilos d’échantillons seront ramenés vers les laboratoires pour de longs mois d’analyses et d’interprétation, malheureusement très ralentis par la crise sanitaire.

Néanmoins, d’ores et déjà, la composition chimique de l’eau de mer, l’abondance et la diversité des organismes qu’elle contient ont pu révéler les multiples impacts de ces éléments sur la biogéochimie de l’oasis situé à l’ouest de l’Arc des Tonga (figure 1), permettant ainsi de vérifier notre hypothèse de départ. Un des objectifs sera d’extrapoler nos résultats acquis sur une relativement petite zone pour permettre de quantifier à grande échelle le rôle de telles sources sur le cycle du carbone, ce qui sera possible grâce à la modélisation.
Container laboratoire « salle blanche » permettant de « rentrer » la rosette à l’abri de toute contamination liée au navire (panache, métaux de la structure métallique, cuisine etc.). Chaque bouteille contient de l’eau prélevée à une profondeur donnée. Dans le container, l’eau est filtrée par les scientifiques et stockée dans différents flaconnages. Les concentrations en métaux trace de ces précieux échantillons seront analysés à terre par plusieurs équipes.
Container laboratoire « salle blanche » permettant de « rentrer » la rosette à l’abri de toute contamination liée au navire (panache, métaux de la structure métallique, cuisine etc.). Chaque bouteille contient de l’eau prélevée à une profondeur donnée. Dans le container, l’eau est filtrée par les scientifiques et stockée dans différents flaconnages. Les concentrations en métaux trace de ces précieux échantillons seront analysés à terre par plusieurs équipes. 
©Hubert Bataille


Un autre container laboratoire « salle blanche » où sont installés des larges réacteurs dans lesquels nous avons réalisé des ajouts croissants de fluides hydrothermaux à de l’eau de surface afin de suivre les effets des sources hydrothermales sur l’abondance et la diversité du plancton.
©Hubert Bataille

 

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