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Vous vous demandez quel dispositif au sein de votre téléphone portable permet la rotation de l’écran lorsque vous l’orientez à la verticale ou à l’horizontale ? Ce sont des composants électroniques issus de travaux de recherche et conçus par une entreprise comme STMicroelectronics. Le fabricant français de semi-conducteurs met au point un grand nombre de technologies utilisées dans de nombreux secteurs tels que l’industrie automobile, les télécommunications, etc. Ce sont ainsi des microcontrôleurs, des solutions sécurisées, des capteurs de mouvement ou d’image, des composants de connectivité ou encore des composants de gestion de la consommation de l’énergie que l’on retrouve sous le nom de puces électroniques. Pour rester à la pointe de l’innovation, l’entreprise s’appuie sur de nombreux partenariats académiques, en particulier avec le CNRS.
Un tissu de laboratoires
Ces collaborations sont bénéfiques pour les deux partenaires. D’un côté, c’est la possibilité pour les chercheurs d’expérimenter des idées nouvelles au travers de moyens technologiques au meilleur état de l’art mondial. « Travailler conjointement avec STMicroelectronics nous permet d’aborder des problématiques concrètes et d’avoir accès à de nouveaux sujets de recherche », décrit Olivier Joubert, chercheur au Laboratoire des technologies de la microélectronique à Grenoble1.
De l’autre, l’industriel a besoin de développer des techniques, des méthodes ou de concevoir de nouveaux produits pour rester compétitif. « Nous devons constamment relever de nombreux défis techniques et technologiques. Coopérer avec les laboratoires du CNRS et du CEA Leti nous apporte des compétences très pointues et une capacité à investir dans des projets de recherche sur des temps longs pour un industriel », précise Laurent Malier, directeur des développements technologiques chez STMicroelectronics.
Le partenariat entre le CNRS et le fabricant de semi-conducteurs s’appuie actuellement sur cinq laboratoires communs et de nombreux programmes de recherche impliquant plus d’une trentaine d'autres laboratoires ou de thèses (plus de 35 nouvelles par an). Les problématiques sont larges : gestion de la consommation des puces, mémoire résistive, radio fréquence, capteurs d’images, etc. Mais les objectifs restent globalement les mêmes : explorer des nouveaux concepts ou améliorer l’existant.
Un partenariat de longue date
En microélectronique, des milliards de transistors sont réalisés sur des plaques de silicium. Leur fabrication nécessite des centaines d’opérations qui doivent être fiables et reproductibles. Il faut ainsi constamment comprendre chacune de ces étapes dans le process, déterminer les plus importantes et les contrôler. Les travaux menés par des laboratoires académiques apportent beaucoup aux industriels sur ces aspects : « Nous avons besoin, par exemple, de modèles très précis pour comprendre de façon détaillée comment la matière se comporte au niveau microscopique et nanométrique, de sorte que toutes ces étapes de fabrication soient le plus fiables possible », explique Dominique Thomas, directeur des partenariats R&D chez STMicroelectronics.
D’autant que la microélectronique est fortement soumise à l’évolution rapide des technologies et des matériaux qu’elle utilise. La recherche dans le domaine des matériaux est ainsi un thème récurrent. Au laboratoire Matériaux, microélectronique, acoustique et nanotechnologies de Tours2, les recherches portent sur l’utilisation de matériaux composites tels que le nitrure de galium dans les semi-conducteurs. Déposé sur une couche de silicium, celui-ci doit répondre à des impératifs de courant élevé en vue d’une utilisation notamment dans l’automobile.
Globalement, la recherche fondamentale joue un rôle essentiel. Depuis plus de quinze ans, la radiofréquence (au-delà de 30 GHz) et des problématiques de transmissions de données animent les collaborations. « Pendant longtemps, le silicium ne se prêtait pas à l’exploration du domaine millimétrique, désormais, nous cherchons des façons de concevoir des antennes et des puces et à caractériser ces composants avec ce matériau, jusqu’au THz », explique Dominique Thomas. Des préoccupations qui prennent encore plus d’importance avec la 5G.
Des sujets d’avenir à construire
Les recherches évoluent en fonction des coûts des différentes technologies et des applications. Pour l'industriel, les besoins en R&D sont donc très importants puisqu’il est nécessaire d’intégrer de nouveaux matériaux et de viser des domaines applicatifs très variés comme le véhicule électrique et/ou autonome, la robotique, la réalité virtuelle ou augmentée ou la médecine. Cela implique des compétences variées et de mener des recherches plus transversales. Dernières préoccupations en date : l’intelligence artificielle (IA), la 5G, les métamatériaux pour l’optique ou encore les calculateurs quantiques.
Dans le contexte de protection et de souveraineté des données, l’industriel veut développer des capacités d’IA embarquée sur puce. Plus besoin d’échanger les informations vers le réseau, tout doit fonctionner en local. Mais cela signifie également que des IA ne bénéficient pas de la puissance de supercalculateurs. « Pour cela, il nous faut de nouvelles connaissances théoriques : comment faire des processeurs efficaces pour un traitement le plus approprié dans une enveloppe limitée de puissance », explique Dominique Thomas.
Faire évoluer les collaborations demeure un élément clé, tant pour les industriels que pour les centres de recherche. Depuis deux ans, un groupe d’experts du CNRS animé par Olivier Joubert, œuvre à l’identification des expertises et au regroupement des savoir-faire du CNRS en microélectronique. Un important recensement a été mené sur des thématiques fortes telles que la conception des circuits, la nanofabrication, la nanoélectronique, l'électronique de puissance, etc.
« Souvent, les collaborations reposent sur des accords bilatéraux auxquels on pourrait apporter encore plus d’envergure. Notre objectif dans le domaine de la microélectronique est de faire évoluer ces partenariats et d’initier de nouveaux programmes impliquant l’ensemble du CNRS. De quoi consolider nos échanges pour des collaborations futures », décrit Olivier Joubert. Première étape, le workshop du 9 juillet dernier qui avait pour mission de commencer à décloisonner les thématiques et à élargir les champs de collaborations actuelles. ♦
Commentaires
IA embarquée
Mhaider81 le 1 Septembre 2019 à 09h29Connectez-vous, rejoignez la communauté
du journal CNRS