Logo du CNRS Le Journal Logo de CSA Research

Grande enquête « CNRS Le Journal »

Votre avis nous intéresse.

Le CNRS a mandaté l’institut CSA pour réaliser une enquête de satisfaction auprès de ses lecteurs.

Répondre à cette enquête ne vous prendra que quelques minutes.

Un grand merci pour votre participation !

Grande enquête « CNRS Le Journal »
Donner du sens à la science

A propos

Bienvenue sur le blog de Cécile Michel, destiné à vous faire découvrir trois mille ans d’histoire d’un Proche-Orient aux racines complexes et multiples, à travers les découvertes et les avancées de la recherche en assyriologie et en archéologie orientale. (Version anglaise ici)

Les auteurs du blog

Cécile Michel
Assyriologue, directrice de recherche au CNRS dans le laboratoire Archéologies et Sciences de l’Antiquité

A la une

Le miraculeux destin du trésor des reines assyriennes
29.09.2020, par Cécile Michel
Mis à jour le 29.09.2020

Il y a un peu plus de trente ans, les Irakiens ont exhumé un trésor fabuleux, composé de bijoux et d’objets luxueux, dans les tombes des reines assyriennes à Nimrud, l’ancienne Kalhu. L’essentiel de ces découvertes a miraculeusement été préservé malgré les fléaux qui se sont abattus sur l’Irak depuis : la guerre du Golfe, le pillage du musée de Bagdad et le dynamitage du palais de Kalhu par Daesh.

Biljou des reines de Kalhu d'après Hussein 2016 pl 129.Biljou des reines de Kalhu d'après Hussein 2016 pl 129.

À la fin des années 1980, les Irakiens décident de reprendre des fouilles à Kalhu, capitale du roi assyrien Assurnazirpal II (883-859) et de ses successeurs jusqu'à la fin du 8e siècle. Ils concentrent leurs travaux sur le palais bâti par ce roi au nord-ouest de l’acropole, préalablement exploré par Max Mallowan, le second époux d’Agatha Christie, dans les années 1950. Sous certaines salles du secteur sud du palais habité par les femmes, des tombes, pour certaines composées de plusieurs pièces, avaient été creusées.

En 1988, les Irakiens découvrent une première tombe, abritant le squelette d’une femme d’une cinquantaine d’année, enterrée avec une quantité impressionnante de bijoux, vases ou figurines en or, argent et pierres précieuses. En 1989, une deuxième tombe inviolée est dégagée ; le sarcophage qui s’y trouve protège les corps de deux femmes inhumées à quelques décennies d'intervalle ainsi que plus d’un demi-millier de pièces de bijoux, principalement en or. Selon des inscriptions, cette tombe était celle de la reine Yabâ, l’épouse de Tiglath-phalazar III (745-727). Le corps placé au-dessus était celui de la reine Ataliya, l’épouse du roi Sargon II (721-705). Un peu plus tard la même année, les archéologues dégagent une troisième tombe, violée et pillée dans l’antiquité, avec un sarcophage en albâtre inscrit au nom de la reine Mulissu-mukannišat-Ninua, l’épouse d’Assurnazirpal II. Trois autres sarcophages reposaient dans l’antichambre de cette tombe, enfermant également des squelettes de femmes de la famille royale. Enfin, en 1990, une quatrième tombe est découverte, également vidée de ses biens dans l’antiquité.

Collier en or de Kalhu d'après Hussein 2016 pl 46.Collier en or de Kalhu d'après Hussein 2016 pl 46.

L’inventaire des objets découverts dans les deux premières tombes, est impressionnant. Rien que dans la deuxième tombe, les couronnes, diadèmes, colliers, torques, pendentifs, boucles d’oreilles, bracelets, bagues, perles, chaînes et vaisselles précieuses représentaient plus de 26 kilogrammes d’or. Une telle quantité de trésors risquant d’attirer les convoitises, chacune des tombes a été vidée en une journée ; leur inventaire détaillé n’a été établi que des années plus tard.[1]

Dès le mois d’août 1990 la guerre du Golfe éclate. Les bijoux et autres objets en or, cristal de roche, lapis-lazuli, agate et turquoise, ainsi que des figurines en ivoire, découverts dans ces tombes royales sont enfermés dans des caisses cachées dans une chambre forte au sous-sol de la banque centrale de Bagdad. Les bombes atteignent la banque, mais la chambre forte reste intacte, et les caisses contenant le trésor des reines assyriennes y demeurent jusqu’au début du vingt-et-unième siècle dans le secret le plus complet malgré les rumeurs circulant sur leur disparition.

En 2003, lors de la seconde guerre du Golfe et l’invasion américaine, le musée d’Irak à Bagdad est pillé et beaucoup de pièces archéologiques, y compris venant des tombes des reines de Kalhu disparaissent. La banque centrale est une nouvelle fois bombardée. Une tentative d’effraction à l’aide d’une roquette échoue mais cause une inondation dans les sous-sols de la banque. Ce n’est que lorsque la masse d’eau fut pompée que le contenu des caisses a pu être inventorié. L’or des bijoux est resté intact, en revanche les incrustations de certains bracelets et bagues ont été endommagées et les ivoires partiellement détériorés.
Redécouverte des bijoux des reines de Kalhu dans les caves de la banque centrale.Redécouverte des bijoux des reines de Kalhu dans les caves de la banque centrale.

Sans doute pour faire taire les rumeurs, une partie du trésor des reines assyriennes a été présentée au musée le 3 juillet 2003 avant d’être à nouveau précautionneusement emballé et placé en lieu sûr où il repose sans doute encore aujourd’hui. Il faudrait que la paix s’installe définitivement en Irak pour que les visiteurs puissent à nouveau admirer le trésor des reines assyriennes au musée de Bagdad.

[1] Hussein M. M., 2016, Nimrud. The Queens’ Tombs, Baghdad et Chicago. Les bijoux reproduits ici proviennent de cet ouvrage.

 

Commentaires

0 commentaire
Pour laisser votre avis sur cet article
Connectez-vous, rejoignez la communauté
du journal CNRS