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Bienvenue sur le blog de Cécile Michel, destiné à vous faire découvrir trois mille ans d’histoire d’un Proche-Orient aux racines complexes et multiples, à travers les découvertes et les avancées de la recherche en assyriologie et en archéologie orientale. (Version anglaise ici)

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Cécile Michel
Assyriologue, directrice de recherche au CNRS dans le laboratoire Archéologies et Sciences de l’Antiquité

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Nouvel An et calendrier en Mésopotamie antique
24.12.2017, par Cécile Michel
Mis à jour le 24.12.2017

Dans le calendrier grégorien qui est le nôtre, en vigueur depuis 1582, le décompte des années prend comme point de départ l’ère chrétienne, c’est-à-dire la naissance (estimée) de Jésus-Christ. C’est un calendrier solaire, avec des mois de 28 à 31 jours, le nouvel an coïncidant avec le 1er janvier. Qu’en était-il en Mésopotamie antique ?

Le calendrier mésopotamien était fondé sur des intervalles de temps naturels que représentent la marche du soleil, le cycle des saisons et le mouvement de la lune dans le ciel. C’était un calendrier luni-solaire avec une année solaire et des mois lunaires, ce qui n’était pas sans poser quelques problèmes. L’année solaire est définie par le retour successif des saisons : c’est la durée mise par la Terre pour faire une révolution autour du Soleil. En Assyrie et en Babylonie au 1er millénaire, le nouvel an était fêté le jour de l’équinoxe de printemps (mars-avril).

Mais aux 3ème et 2ème millénaires, les calendriers divergeaient selon les villes et périodes considérées. Par exemple, à Ebla (Syrie, 24ème siècle), la nouvelle année débutait à l’équinoxe d’automne. C’était également le cas dans royaume Haute-Mésopotamie au début du 2ème millénaire, avant que Zimrī-Lîm, roi de Mari dans la première moitié du 18ème siècle, ne décide de reprendre l'ancien calendrier et fait basculer le Nouvel An à l’équinoxe de printemps. À la même époque à Assur, l’année commençait avec le solstice d’hiver.

Pour compter les années, les Mésopotamiens se référaient aux années de règne de leurs souverains selon trois systèmes différents. En Mésopotamie du Sud au milieu du 3ème millénaire ou à Babylone au début du 2ème millénaire, le nom de l’année évoquait un événement survenu l’année précédente et glorifiant l’œuvre du roi, une victoire militaire, des travaux de construction ou un acte particulièrement pieux. À Assur au début du 2ème millénaire et dans l’empire assyrien du Ier millénaire, l’année empruntait le nom d’un dignitaire désigné comme éponyme. Dans les deux cas, il est très difficile aujourd’hui de remettre les années dans l’ordre lorsque l’on ne possède pas de listes donnant la succession des noms d’années ou des éponymes.

En Babylonie, dès le milieu du 2ème millénaire, les années de règnes sont numérotées à partir du début du règne du roi. Ce n’est seulement qu’à partir de 311 av. J.-C. que l’on fixe un point de départ pour une comptabilisation unique des années, à partir de l’accession au trône de Séleucos 1er.

Le mois lunaire est défini comme l’intervalle de temps entre deux apparitions successives de la nouvelle lune sur l’horizon ouest après le coucher soleil. Ce n’est pas toujours facile à observer. Il était donc difficile de décider si le mois en cours comptait plutôt 29 ou 30 jours. Ce découpage des mois est resté empirique jusqu’à la seconde moitié du 1er millénaire où l’on dresse des tables d’éphémérides permettant de fixer le début du mois. Les mois étaient désignés selon les activités qui y étaient effectuées, qu’elles soient agricoles ou religieuses ; ils variaient selon les villes, ce qui ne facilite pas le travail de l’historien aujourd’hui.

L’utilisation de mois lunaires et d’une année solaire pose des problèmes de synchronisation. En effet, 12 mois lunaires de 29 ou 30 jours correspondent à 354 jours, il manquait donc 11 jours pour compléter l’année solaire. Afin de combler ce retard, les Mésopotamiens intercalaient de temps à autre un treizième mois. La décision d’ajouter un mois à l’année en cours revenait au roi et était empirique. Ce n’est que vers 400 av. J.-C. que l’on trouve un schéma mathématique avec une correspondance entre 19 années solaires et 235 mois lunaires, et donc l’ajout de 7 mois intercalaires en 19 ans.

Si le monde occidental s’apprête à fêter le Nouvel An le 1er janvier, pour les Iraniens et les Kurdes, le Nouvel An célèbre encore l’arrivée du printemps. En Chine, selon le calendrier luni-solaire en vigueur, la nouvelle année commence entre le 21 janvier et le 19 février de notre calendrier, lors de la deuxième nouvelle lune après le solstice d’hiver. Dans le calendrier hébraïque, le Nouvel An débute avec le mois de tishri qui, selon les années, tombe en septembre ou octobre du calendrier grégorien. Dans le calendrier musulman, le premier jour de l’année commémore l’Hégire (en 622 du calendrier grégorien) ; selon le calendrier lunaire en vigueur, cette fête est avancée de 11 jours chaque année par rapport au calendrier grégorien.

Quelle que soit la date de la nouvelle année, souhaitons à tous que celle-ci soit placée sous le signe de la paix !
 

Conférence en ligne: "Le temps dans le Proche-Orient cunéiforme: chronologie, mesure et calendriers", décembre 2017, Paris Diderot: Les battements du temps, Rencontres transdisciplinaires du Centre d'Etudes du Vivant, Institut des Humanités de Paris, dir. Jean-Claude Ameisen.