Donner du sens à la science

A propos

À travers différents projets mêlant plusieurs disciplines, ce blog vous invite à découvrir la recherche en train de se faire. Des scientifiques y racontent la genèse d’un projet en cours, leur manière d’y parvenir, leurs doutes… Ces recherches s'inscrivent dans le programme « Science avec et pour la société » de l’Agence nationale de la recherche (ANR).
Pour en savoir plus, lire l'édito.

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Par le réseau de communicants du CNRS

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L’étude des pulsars, une fenêtre sur notre galaxie
30.01.2025, par Camille Basile, Délégation Occitanie Ouest
Mis à jour le 30.01.2025

Les galaxies sont des écosystèmes complexes qui questionnent encore beaucoup les scientifiques. Le projet GAMALO a pour but d’étudier un phénomène qui pourrait apporter une meilleure compréhension de leur fonctionnement : les pulsars. 

 « Dans la galaxie, on observe un phénomène d’accélération des particules telles que des protons, des électrons ou des noyaux. Ce processus est similaire à ce que l'on pourrait imaginer dans nos accélérateurs de particules anthropiques comme celui du CERN. Mais, comme pour beaucoup de choses, la nature le fait de manière plus efficace que nous », nous explique Pierrick Martin, chercheur à l'Institut de recherche en astrophysique et planétologie1 et porteur du projet GAMALO (Révéler l’étendue des halos gamma). Ces particules accélérées, également appelées les rayonnements cosmiques, sont encore mal comprises mais jouent un rôle structurant dans les galaxies.  

Pierrick Martin est astrophysicien des hautes énergies ; il étudie les phénomènes cosmiques les plus énergétiques et violents comme les explosions d’étoiles ou l’accrétion de matière en trou noir. Son travail concerne également les rayonnements cosmiques car ceux-ci sont une source de rayonnement particulièrement élevée. Les comprendre nous permettrait de mieux comprendre notre galaxie et les galaxies en général. En effet, il est essentiel de mieux appréhender les interactions des objets qui les constituent et leurs interconnexions. 

Cependant, ces particules très énergétiques sont difficiles à observer car elles sont peu nombreuses et très couteuses à produire énergétiquement. La découverte des pulsars a révolutionné le domaine et ouvert de nouvelles possibilités de recherche. 

La découverte des pulsars ouvre un nouveau champ d’études 

En 2017, grâce à un télescope au sol HAWC, une équipe de recherche découvre des pulsars, ces objets compacts qui accélèrent les particules qui entrent dans son champ. 

Ces pulsars, entourés d’halo de gamma, un rayonnement électromagnétique extrêmement puissant, produisent de la lumière.  

Le High Altitude Water Cherenkov Experiment est un observatoire de rayons gamma et de rayons cosmiques de très hautes énergies au Mexique. © Jordanagoodman CC BY-SA 4.0  Le High Altitude Water Cherenkov Experiment est un observatoire de rayons gamma et de rayons cosmiques de très hautes énergies au Mexique. © The HAWC Collaboration. 

Les pulsars avec halo gamma sont des fenêtres, des loupes, sur les rayonnements cosmiques, offrant une opportunité de les observer dans un espace confiné plutôt que librement dans la galaxie. Le projet GAMALO s’intéresse aux pulsars et à leur fonctionnement. Habituellement, il est difficile de relier les particules très énergétiques à leurs sources par l’observation, c’est donc une condition avantageuse. Au-delà des pulsars, cette étude permet de comprendre le rôle des rayonnements cosmiques dans les galaxies, et donc la structure même des galaxies. 

« L’étude du rayonnement cosmique est une quête qui dure depuis un siècle, ce qui est relativement jeune comparé à d’autres objets célestes », souligne Pierrick Martin. De ce fait, les équipes de recherche se posent encore des questions fondamentales. 

Les axes de recherche du projet GAMALO 

Le projet GAMALO vise à répondre à une question essentielle : comment le phénomène des pulsars fonctionne-t-il ? Ce questionnement principal entraine une multitude de sous-questions sur la fréquence de ce phénomène, sa reproductivité ainsi que les possibles observations passées et non détectées. Le projet se décompose alors en trois grands axes, répartis entre quatre laboratoires2

  1. Observer. Les scientifiques cherchent à observer le même phénomène mais ailleurs et dans d’autres conditions. « Comparativement à de la biologie par exemple, les astrophysiciens ne peuvent pas expérimenter. Il nous faut donc observer pour retrouver des phénomènes similaires et ensuite les comparer. » explique Pierrick Martin. L’observation en astrophysique c’est « regarder une région du ciel et donner du sens à ce que l’on voit. Par exemple, voir une source de lumière et découvrir que c’est en fait un nuage de gaz ».  

  1. Théoriser. Les scientifiques recherchent la compréhension physique du processus via la reproduction par des simulations. En partant des principes premiers de la physique, qui sont immuables, ils cherchent un résultat qui donnerait à voir notre ciel. 

  1. Outiller. Les scientifiques s’intéressent par anticipation à la capacité des futurs outils d’observation du ciel. C’est un travail réflexif sur les prochaines découvertes en astrophysique pour concevoir les objets d’observation de demain, plus efficaces et répondant aux mieux aux futurs besoins des scientifiques. 

Les résultats et les questionnements 

Grâce au projet GAMALO, un certain nombre de sources d’énergie ont été identifiées, apportant une meilleure connaissance du ciel. Concernant la modélisation, les scientifiques se sont concentrés sur la modélisation des plasmas, des gaz cosmiques ionisés, et les subtiles interactions entre les particules et ce plasma. Il reste cependant des limites à l’extrapolation théorique. Enfin, les questionnements côté instrumental sont toujours pertinents et aident à imaginer comment les astrophysiciens de demain traiteront les données venant du ciel.  

Une demi-douzaine de publications a vu le jour grâce au projet. Toutes ces recherches ont amené une meilleure compréhension globale du ciel.  

Pierrick Martin estime qu’il est maintenant temps de se tourner vers une autre hypothèse. Selon lui, l’étude des pulsars est en effet « une lucarne sur un phénomène bien plus grand, il est interconnecté à beaucoup de domaines de l’astrophysique. Il est certain que les pulsars jouent un rôle essentiel dans l’évolution des galaxies et la formation des étoiles à l’échelle du cosmos. ». Préciser la nature de ce rôle fera partie des prochaines questions auxquelles s’attaquent déjà Pierrick Martin et ses collaborateurs… 

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Ces recherches et cet article ont été financés pour partie au moins par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR). Cette communication est réalisée et financée dans le cadre de l'appel à projet Science Avec et Pour la Société - Culture Scientifique Technique et Industrielle pour le projet GAMALO des appels à projets génériques 2018-2019. 

 

 

Notes
  • 1. Unité CNRS, CNES, Université Toulouse Paul Sabatier
  • 2. L'Institut de recherche en astrophysique et planétologie -Toulouse (IRAP), le Laboratoire Univers et Particules de Montpellier (LUPM), le Centre d'études nucléaires de Bordeaux Gradignan (CENBG) et l'Institut de recherche sur les lois fondamentales de l'Univers -Saclay (IRFU)