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Ludwik Leibler, inventeur européen de l’année

Ludwik Leibler, inventeur européen de l’année

09.06.2015, par
Ludwik Leibler
Ludwik Leibler, spécialiste de la physique et chimie des polymères, est lauréat de la médaille de l’innovation du CNRS 2013.
Jeudi 11 juin, le physico-chimiste Ludwik Leibler a reçu le Prix de l’inventeur européen de l'année dans la catégorie "Recherche". En 2013, ce spécialiste des matériaux inédits­ nous avait parlé de ses travaux, alors qu’il venait de recevoir la médaille de l’innovation du CNRS.

(Ce témoignage de Ludwik Leibler est paru dans CNRS Le journal, n° 273, juillet-août 2013.)

« L’industrie peut être une source d’inspiration pour la recherche académique en orientant vers des questions scientifiques encore inexplorées. En essayant, par exemple, d’améliorer la résistance au choc des matériaux transparents, nous avons découvert un nouveau principe de la structuration, à l’échelle ­nanométrique, des polymères, des macromolécules formées à partir de l’enchaînement d’un motif simple comme les plastiques, résines et caoutchoucs. Inversement, de nouveaux concepts fondamentaux peuvent être source d’espoir pour une rupture technologique. C’est ainsi qu’avec François Tournilhac, directeur de recher­che au labo­ratoire Matière molle et chimie1, nous nous sommes mis au défi d’employer la chimie supramoléculaire, qui utilise les interactions entre les molécules plutôt que leurs liens chimiques per­manents, pour concevoir des matériaux aux propriétés inédites. L’idée, au départ, a fait sourire les industriels, car la chimie supra­moléculaire ne permettait de produire jusqu’alors que quelques grammes de matière.

Un caoutchouc qui s’auto-répare

En partenariat avec le groupe Arkema, nous avons ainsi conçu un caoutchouc capable de s’auto-­réparer une fois endommagé. Grâce à la chimie supramoléculaire, les associations intermolé­culaires rompues se reforment spontanément. La synthèse de ce caoutchouc est plutôt simple, et ses ingrédients, des acides gras et des résines époxy, sont disponibles, ce qui permet d’envisager une production industrielle si le marché des ­matériaux auto-réparants se développe.

Vitrimère, nouveau matériau organique.
Ce matériau, appelé vitrimère, est façonnable à chaud comme le verre.
Vitrimère, nouveau matériau organique.
Ce matériau, appelé vitrimère, est façonnable à chaud comme le verre.

Nous avons aussi mis au point une nouvelle classe de matériaux insolubles et façonnables comme le verre : le vitrimère. Constitué d’un réseau moléculaire capable, sous l’action de la chaleur, de se réorganiser sans changer le nombre de liaisons entre les atomes, ce matériau inédit passe progressivement, comme le verre, de l’état liquide à l’état solide, et inversement. Il reste léger et incassable comme le plastique. La chimie mise en œuvre et les principes physiques sous-jacents paraissent très simples. La simplicité nous tient à cœur, car une inno­vation est d’autant plus séduisante qu’elle s’exprime et se réalise simplement. Elle montre aussi que nous sommes arrivés à un niveau de compréhension élevé de la matière, que nous en avons compris les règles essentielles.

Valoriser la liberté de créer

Le CNRS offre la possibilité réelle d’être libre dans ses recherches et de prendre des risques. C’est ce qui favo­rise, au sein d’une équipe de chercheurs, initiative et créativité. La recherche industrielle, souvent très pragmatique, permet paradoxalement la rencontre de différentes disciplines – physique, chimie ou mécanique. La création, en 1996, d’un laboratoire mixte de recherche CNRS-Elf-Atochem dans le domaine des polymères a permis d’avoir une ­approche scientifique globale dans le cadre d’une démarche qui n’était pas très courante à l’époque.

Le laboratoire Matière molle et chimie, qui a succédé à cette unité mixte en 2004, conserve la même dynamique. Les sept chercheurs permanents entourés d’une vingtaine de thésards et post-docs forment une équipe véritablement pluridisciplinaire et mettent ainsi leur créativité au service d’une recherche fondamentale ambitieuse, ouverte aux applications permettant de faire des découvertes innovantes. La médaille de l’innovation du CNRS est pour moi une reconnaissance du caractère ori­ginal de nos travaux et récompense la liberté de création que nous avons toujours tenu à conserver. Une liberté qui nous permet de précéder les modes, plutôt que de les suivre. »

À lire : Une méthode révolutionnaire pour coller les gels et les tissus biologiques

À voir, le film sur les travaux de Ludwik Leibler, réalisé à l’occasion de la remise de la médaille de l’innovation 2013 du CNRS :

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À propos
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Description: 
Ludwik Leibler est directeur de recherche de classe exceptionnelle au CNRS, directeur du laboratoire Matière molle et chimie et professeur associé à l'ESPCI ParisTech. Éclectique, physicien théoricien de formation, il a su développer des travaux fondamentaux de pionnier dans le domaine de la physique et chimie des polymères. Mondialement connu pour ses contributions essentielles dans le domaine de la nano-structuration et dynamique des polymères, Ludwik Leibler a su nouer un dialogue permanent avec le monde industriel. Des collaborations étroites, allant jusqu'à la création d'un laboratoire mixte, avec des groupes tels que Arkema et Total ont contribué à des innovations de rupture. Ludwik Leibler a su inventer des matériaux complétement originaux en combinant une réflexion théorique profonde et le souci d'une exploitation industrielle quasiment intégrée dès la conception. Ludwik Leibler est lauréat 2013 de la Médaille de l'innovation du CNRS.
Année de production: 
2013
Durée: 
4 min 38
Réalisateur: 
Claude Delhaye
Producteur: 
CNRS Images
Intervenants: 
Ludwik Leibler (CNRS) | Laboratoire Matière Molle et Chimie (MMC - CNRS / ESPCI ParisTech)

Pour en savoir plus sur le Prix de l’inventeur européen et les finalistes : www.epo.org

 

Notes
  • 1. Unité CNRS/ESPCI ParisTech.

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