Un autre regard sur les matériaux anciens
Avis aux curieux : vous allez franchir dans ce diaporama les portes d’un monde où le passé le plus ancien est relu à l’aune de technologies ultra performantes par des scientifiques spécialistes en archéologie, paléontologie, histoire de l’art, histoire, histoire des archives et de la conservation-restauration du patrimoine, mais aussi en sciences de la nature et des données. Les photos sont exposées jusqu’au 29 mai dans cinq gares franciliennes.
Les plus joueurs peuvent tenter de deviner ce que chaque photo montre avant de lire sa légende. Voici des indices. L’exposition « Objets de culture, matériaux et diversité » réunit des photos inédites, où art et science s’entremêlent. La photographe Laurence Godart dévoile ici la minutie, la concentration, la collaboration et la curiosité qui animent les équipes de scientifiques au quotidien. Elle fixe des instants de cinq années de recherche sur des matériaux anciens. Fruit d’un partenariat entre le CNRS, la Région Île-de-France et SNCF Gares & Connexions, l’exposition répond à la volonté partagée d’ouvrir la science au public. Elle s’affiche jusqu’au 29 mai 2023 dans cinq gares franciliennes : Austerlitz, Lyon, La Courneuve, Massy TGV et Versailles-Chantier.
CNRS Images prolonge ici l’exposition avec les photos des 25 projets présentés dans l’exposition.
1
Est-ce l’atelier de Vulcain ? Presque. Ici, un verre en fusion coule dans un moule en graphite dans un laboratoire. Contrairement à une idée reçue, le verre ne résiste pas toujours à l’épreuve du temps. Certains vitraux du Moyen Âge sont très réactifs aux agents atmosphériques (humidité, polluants, températures…). Leurs altérations font l’objet de nombreuses recherches scientifiques pour mieux comprendre les processus physico-chimiques en jeu. Le projet BruMe s’intéresse au brunissement des vitraux, et à la possible implication de micro-organismes dans ce phénomène, et tente de reproduire la « maladie » en laboratoire.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Un caillou peut-il être utile ? C’est le cas de ce moulin à céréales provenant d’un village d’agriculteurs néolithiques de Picardie autour de 5000 av. J.-C. La fonction d’un instrument en pierre est déterminée par l’étude de traces – ou tracéologie – en synergie avec d’autres disciplines aussi pointues, telle la carpologie (étude de graines retrouvées dans des contextes archéologiques). Les scientifiques du projet AMIDON se penchent sur la transformation des végétaux par les premières populations sédentaires du début du Néolithique (de 5200 à 4700 av. J.-C. environ), en Europe nord-occidentale. L’exploitation de plantes a ainsi été mieux cernée.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Qui a peint ce coquillage ? Les motifs, révélés par une lumière ultraviolette, sont produits par le coquillage lui-même. Et c’est heureux, car cela permet de différencier les 70 000 espèces du vaste groupe des mollusques auquel il appartient. C’est un escargot de mer (gastéropode Vetigastropoda du genre Turbo) récolté en Aquitaine et âgé de 30 millions d’années. Son état de conservation exceptionnel révèle une alternance de bandes claires et rouges. Le projet PRESERV s’est intéressé à ces traces qui aident à comprendre l’histoire évolutive des coquilles qui s’étend sur plusieurs millions d’années. PRESERV a aussi permis de réfléchir à l’interaction entre les concepts de conservation, d’altération et de fossilisation
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Prêt pour un origami ? Ces trois petits bouts de papier ont été vieillis artificiellement et photographiés sous une lampe ultraviolette, après le dépôt d’un colorant extrait du chèvrefeuille mexicain (Justicia spicigera). On voit au centre sa fluorescence rouge caractéristique, qui varie selon le temps de vieillissement. Ce colorant, traditionnellement employé pour les textiles, a été utilisé dans un manuscrit aztèque du XVIᵉ siècle conservé à la bibliothèque de l’Assemblée nationale, le Codex Borbonicus. Le projet JUSTICIA (du nom latin de la plante) a permis l’identification des composés à l’origine de la coloration. La préparation du colorant et sa stabilité dans le temps ont été explorées afin de permettre son identification dans d’autres objets du patrimoine culturel mésoaméricain.
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Comment dater ces tuyères en terre cuite ? La datation, cruciale en archéologie, est très difficile sur les sites métallurgiques où les traces habituellement utilisées ont disparu. Une solution passe par l’archéomagnétisme, qui étudie l’« empreinte » du champ magnétique terrestre dans les matériaux chauffés, comme ces tuyères ou les parois de four. Ici, le début de fusion observé à leur extrémité (partie noire) témoigne des hautes températures (1 300 °C) atteintes par les artisans pour obtenir du fer à partir du minerai. Les chercheurs du projet DATOGO ont étudié un site ancien de métallurgie du fer (XIIᵉ siècle) à Douloumey, au Bénin. Ils ont identifié, au microscope optique, des grains de minerai de fer particuliers. Un instant figé de la transformation de la matière !
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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À quoi servent ces deux « pointes » de métal ? Elles scrutent un échantillon de taille nanométrique (difficile de l’imaginer mais il est un milliard de fois plus petit qu’un mètre). C’est la ligne de lumière Nanoscopium, au sein du synchrotron Soleil, à Paris-Saclay, qui braque son rayon X sur un échantillon d’une centaine de nanomètres carrés. Approchez-vous ! Sur le support noir, l’échantillon blanc en forme de Y est un fragment de carbonates de calcium formé par le bryozoaire Cellaria fistulosa. Comme d’autres êtres vivants, il convertit en calcaire le gaz carbonique dissous dans l’eau de mer. On appelle ce phénomène la « biominéralisation » des carbonates, véritables archives du passé. Lors du projet POLIMO, les techniques de pointe ont permis des observations inédites des processus cellulaires et enzymatiques impliqués.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Insecte fossilisé, reste carbonisé, roche taillée ? Un peu tout cela à la fois : un pendentif découvert dans la grotte du Trilobite à Arcy-sur-Cure (Yonne). Il représente un insecte coléoptère simplifié et sculpté dans une roche noire (torbanite d’Écosse). C’est l’un des objets étudiés dans le cadre du projet MAT-PAR qui s’intéresse à l’exploitation et la diffusion des ressources locales (coquillages) et à l’importation de matériaux (roches noires du Jura et d’Écosse) pour la fabrication d’objets de parure chez les populations de chasseurs-collecteurs nomades ayant occupé le Bassin parisien au Magdalénien (13 000 ans avant notre ère). L’intégration de ces matières dans des réseaux d’échanges transeuropéens témoigne du dynamisme des économies et des connexions sociales établies dès cette période ancienne de la Préhistoire.
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8
Un animal a-t-il perdu ses griffes ? Que nenni ! Voici des spécimens de brachiopodes actuels – des invertébrés marins – avec une coquille à deux valves qui protège leur corps mou, et contrairement aux apparences, ils n’ont rien de commun avec les moules. Le projet AFM4astory étudie les coquilles à valves articulées, de nature calcitique (composées de carbonates de calcium), afin de mieux comprendre l’effet des altérations survenues au cours de la fossilisation.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Cette poudre vaut-elle de l’or ? Ce serait trop beau. C’est de l’os de dinosaure trouvé au cœur du vignoble de Cognac, à Angeac-Charente. Il est composé – comme nos os et nos dents – de phosphate de calcium, transformé en cristaux de phosphates d’argent qui forment cette poudre jaune doré (elle contraste avec les teintes sombres de l’os en arrière-plan). L’objet du projet PACé est d’analyser des éléments chimiques de l’écosystème au Crétacé (carbone, oxygène, soufre, calcium ou strontium) présents dans les fossiles. Ces analyses permettent de déterminer sous quel climat et dans quel environnement vivait la faune et de reconstruire la chaîne alimentaire, afin de comprendre leurs interactions dans l’écosystème.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Voyez-vous des truffes au chocolat ? C’est bien moins goûteux ! Ces excréments d’animaux domestiques herbivores actuels – des crottes de mouton donc – sont analysés pour identifier les spores (semences) de champignons qui poussent dessus. En retrouver dans des sédiments anciens témoignerait de la présence des herbivores et de pratiques pastorales dans les milieux étudiés. Dans le cadre du projet NPP-ARID, l’étude des grains de pollen et des spores de champignons permet de retracer les changements des paysages anciens et les activités humaines à partir du Néolithique, il y a environ 8 000 ans, dans les zones semi-arides de la Tunisie centrale. Les analyses polliniques révèlent l’histoire des paysages en réponse à l’aridité croissante, la végétation méditerranéenne laissant progressivement la place aux steppes à graminées et armoise.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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Quels secrets recèle la toile d’un artiste ? L’observer de près permet de préciser le nombre de fils dans 1 cm² et la structure du maillage. L’examen du support utilisé renseigne sur l’industrie des matériaux dont l’artiste se sert. L’œuvre d’art devient la source première d’information. Le projet d’équipement RIR-PEINT s’appuie sur un système de réflectographie infrarouge, qui peut révéler un éventuel dessin sous-jacent, les repentirs de l’artiste, les changements de composition au cours du travail pictural ou le choix de pigments. Comprendre les modes opératoires des artistes est l’ambition de l’histoire technologique de l’art.
Laurence Godart / DIM PAMIR / CNRS Images
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