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Découverte au XIXe siècle et fouillée pendant une douzaine d’années au début du siècle suivant, Assur est la plus ancienne des capitales assyriennes. Objet de missions ponctuelles au cours du XXe siècle, le site, un temps menacé par un projet de barrage, fait de nouveau l’objet de fouilles archéologiques depuis le début de 2023 par une équipe de Munich.
Située à Qal‘at Sherqat, sur un promontoire rocheux longeant le Tigre, à 100 km au sud de Mossoul, Assur est fouillée à partir de 1903 par l’allemand W. Andrae avec des méthodes révolutionnaires. En effet, jusqu’alors les archéologues, incapables de repérer les murs en briques d’argile crue, recherchaient des statues et inscriptions. Architecte de formation, W. Andrae dresse les plans des palais et temples, ainsi que des murailles ceignant la ville couvrant environ 55 ha.
Les travaux, arrêtés par la Première Guerre Mondiale en 1914, n’ont repris que très ponctuellement au cours du siècle passé par des archéologues irakiens et allemands. Les premiers y travaillent entre 1999 et 2001, rejoints par les seconds en 2000 et 2001. Quelques maisons du Ier millénaire av. J.-C. sont exhumées avec les archives laissées par leurs habitants.
Vue générale d'Assur. ©Unesco, Photo: Véronique Dauge.
Assur est occupée dès le début du IIIe millénaire. Son temple dédié à la déesse Ishtar est construit dans une ville alors soumise aux souverains d’Akkad (XXIVe siècle), puis à ceux de la Troisième Dynastie d’Ur qui y nomment un gouverneur (XXIe siècle). À la chute d’Ur III, la ville devient une cité-État indépendante. Ses rois, représentants du dieu Assur sur terre, exploitent sa position à la jonction des principales routes, pour en faire une ville commerciale (XIXe-XVIIIe siècles). De cette époque datent le vieux palais, le temple du dieu Assur et les premières murailles de la ville, mais peu d’autres vestiges, les niveaux correspondant à cette période n’ayant pas encore été explorés. Les marchands d’Assur instaurent un commerce international avec l’Anatolie centrale où ils installent plusieurs dizaines de comptoirs de commerce. Le centre de ces comptoirs se trouve à Kanesh, sur le site de Kültepe qui a livré 22 500 tablettes cunéiformes, dont un nombre considérable de lettres envoyées depuis Assur. La ville prospère ainsi jusqu’à la fin du XVIIIe siècle puis passe sous la coupe d’une dynastie autochtone, avant d’être soumise à Babylone, puis à l’État du Mittani.
La muraille de la vieille ville d’Assur (1921). Photo: Fakhri Mahmood.
Au milieu du XIVe siècle, Assur-uballit Ier libère la ville qui devient la première capitale de l’Assyrie. Les rois qui se succèdent sur le trône restaurent les anciens bâtiments et construisent un nouveau palais et de nouveaux temples dont l’un était consacré à Anu et Adad. Les habitations s’étendent vers le Sud avec la création de la « Ville nouvelle ».
Assur cesse d’être la capitale de l’Assyrie au IXe siècle, sous Assurnazirpal II qui part s’installer à Kalhu. Néanmoins, les temples de la ville continuent à être restaurés, Assur étant régulièrement visitée par les rois en tant que métropole religieuse de l’Assyrie. La ville est prise par les Mèdes en 614 av. J.-C., et semble avoir encore joué un rôle important sous les Parthes (IIIe av.- IIIe ap. J.-C.).
Pendant la dictature de Saddam Hussein, un projet de barrage sur le Tigre a menacé le site, ce qui a conduit l’Unesco à inscrire Assur en 2003 sur la liste du patrimoine mondial en péril. Alors que Qal‘at Sherqat est occupée par Daesh entre 2015 et 2017, la porte monumentale Tabira composée de trois arches menant aux jardins de la déesse Ishtar est fortement endommagée, de même que la maison de fouilles construite par W. Andrae. La porte est restaurée par les autorités irakiennes dans les années qui suivent tandis que la maison de fouilles vient d’être remise en état par l’équipe de Munich.
Ce nouveau projet archéologique dirigé par K. Radner et J. Kreppner consiste d’une part en l’exploration géophysique du site et d’autre part la fouille de la « Ville nouvelle » au sud. Lors de la première mission en février et mars 2023, un relevé magnétométrique à haute résolution de ce secteur a permis d’estimer la profondeur des différentes couches d’occupation. À partir de ces résultats, une tranchée a été creusée jusqu’au sol vierge, confirmant la création, au milieu du IIe millénaire, de la « Ville nouvelle », nom donné à cette extension urbaine par Puzur-Assur III dans ses inscriptions. De la céramique d’époque néo-assyrienne témoigne de la seconde phase d’occupation de ce secteur au début du Ier millénaire.
Par ailleurs, un sarcophage d’époque séleucide daté par une inscription alphabétique de 159/158 av. J.-C. met en lumière une période encore mal documentée à Assur entre l’époque néo-assyrienne et l’époque parthe. Cette dernière est représentée par une tombe à chambre renfermant une douzaine de squelettes dont l’analyse ADN doit fournir des informations fondamentales sur la population d’Assur.
Grâce au retour des archéologues à Assur, il sera possible de mieux comprendre l’histoire de cette capitale assyrienne. Il serait souhaitable que les périodes antérieures de la ville, de sa fondation au milieu du IIe millénaire, encore très peu explorées, fassent également l’objet de fouilles.
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du journal CNRS