Donner du sens à la science

Des virus à l’assaut des bactéries

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Cet après-midi,
Michael Hochberg et son collègue Oliver Kaltz
partent à la chasse aux bacteriophages :
Des virus, inoffensifs pour l'homme mais tueurs de bactéries
et peut être la clé
pour résoudre l'épineux problème de la résistance aux antibiotiques.

Interview Michael Hochberg, biologiste
'Donc là nous prenons un échantillon de cette eau, car c'est dans les stations d'épuration que l'on trouve les bactéries en plus grand nombre dans l’environnement. Les phages ont besoin de bactéries pour se développer. Dans cet échantillon, il doit y avoir quelques 100 millions de phages. Pour nos recherches, il suffira d'en isoler une centaine en laboratoire.'

De redoutables prédateurs invisibles capables - comme n'importe quel virus - de détourner la machinerie cellulaire de leur hôte pour se multiplier.

Interview Michael Hochberg
Nous tentons de mettre au point une méthode pour entrainer les phages
dans le but de mieux contrôler les infections bactériennes. Leur cycle pour infecter et tuer une bactérie est tellement rapide et le nombre de bébés phages qu'ils produisent par bactérie est tellement important que nous pouvons obtenir une très grande diversité de phages dans notre tube à essai.

Il y a 4 ans, Michael Hochberg et son équipe découvrent - en étudiant les mécanismes d'interaction entre ces deux organismes - qu'il est possible de décupler la performance de ces virus en les soumettant à un entrainement intensif un peu particulier ....

Interview Michael Hochberg
Nous prenons une souche bactérienne de référence, que nous appelons la souche mère, nous multiplions sa population avant de la déposer dans une boîte de pétri, puis nous déposons ensuite les phages  goutte par goutte sur le tapis bactérien en fonction de nos besoins.

Interview Claire Gougat-Barbera, biologiste
'Au bout de 24 heures, on peut voir des trous dans la couche bactérienne qui correspondent aux zones où on a déposé les phages on peut ainsi mesurer la concentration des phages dans notre solution initiale.

Interview Michael Hochberg
Nous pouvons obtenir près d'un milliard de phages par millilitre et parmi eux se trouvent des phages mutants, de nombreux virus dont les génomes se sont transformés au cours de mutations aléatoires. Cela signifie que certains de ces phages mutants seront plus efficaces que les autres pour infecter et tuer la bactérie. Donc en les récupérant et en les isolant, nous pouvons ensuite les mettre au contact d'un nouveau tapis bactérien, pour qu'ils les infectent, mutent et l'opération est ainsi effectuée encore et encore. Nous appelons ça des passages en série. Nous pouvons améliorer la capacité de ces phages à contrôler la bactérie.

A chaque infection, les phages, mais aussi les bactéries développent des stratégies pour mieux attaquer ou mieux se défendre - qu'on appelle des mécanismes de co évolution.
Des mécanismes de résistance mutuels pour se défendre...

Interview Michael Hochberg
Nous mettons à profit ce qui se produit dans la nature. Quand les phages sont particulièrement performants, les bactéries ont du mal à produire des mutants car la plupart ont été éliminés. Les phages sont plus à même d'insérer leur matériel génétique dans la bactérie, la détruire, réduire leur nombre et, nous l’espérons, contrôler une infection bactérienne.

Depuis près d'un siècle, ces virus spécialisés non pathogenes pour l’homme intéressent de près le monde de la médecine. Abandonnée en Europe de l’Ouest avec l'avènement de l’antibiothérapie, la phagothérapie suscite désormais un regain d’intérêt depuis le développement de bactéries multiresistantes. Le docteur Chiron, en charge de patients atteints de mucovisidose, connait bien le problème.

Interview Docteur Chiron, pneumologue
Pour les patients, la problèmatique anti-infectieuses est majeure pour la simple et bonne raison qu'il y a de nombreux antibiotiques qui deviennent inéfficaces.
Il y a urgence à trouver une alternative à l'antibiothérapie en général et dans la mucoviscidose en particulier.

Des virus guérisseurs
pour lutter contre les infections bactériennes ...
En France, leur utilisation sur l'homme n'est pas autorisé
contrairement à des pays comme la Géorgie ou encore la Russie.
Dans le cadre de leurs expériences, les chercheurs testent donc leur efficacité sur des larves de papillon.
À terme, les phages pourraient remplacer les antibiotiques devenus inefficaces,
mais dans un premier temps, ils pourraient servir comme complément d’un traitement conventionnel…

Interview Michael Hochberg
Actuellement, nous effectuons des essais pour savoir si - en combinant les antibiotiques et les phages - les résultats sont plus probants que s'ils sont utilisés séparément.  C'est ce qu'on appelle les thérapies combinées et c’est très intéressant car si nous trouvons la bonne combinaison cela pourrait nous amener à soigner certaines maladies mais aussi permettre de minimiser la résistance des bactéries aux antibiotiques'

Contrairement aux antibiotiques, les bactériophages sont des virus très spécifiques et donc moins invasifs. Grâce à leurs récepteurs, ils sont capables de ne reconnaitre qu'une certaine souche bactérienne évitant ainsi de détruire tout ce qui se présente sur leur passage. Alors traitements combinés ou simple alternative, la recherche continue, mais il y a urgence pour de nombreuses organisations de santé publique. Selon certaines estimations, les superbactéries pourraient tuer jusqu'à 10 millions de personnes par an d'ici 2050, soit autant que le cancer.

 

Des virus à l’assaut des bactéries

25.04.2017

Dans la guerre contre les bactéries multirésistantes, une équipe de l'Institut des sciences de l’évolution de Montpellier travaille sur de nouvelles armes : les virus ! Inoffensifs pour les humains mais dévastateurs pour les bactéries, les bactériophages pourraient devenir une solution pour remplacer un jour les antibiotiques devenus inefficaces.

À propos de cette vidéo
Titre original :
Les virus à l'assaut des bactéries
Année de production :
2017
Durée :
6 min 07
Réalisateur :
Juliette Lacharnay
Producteur :
CNRS Images
Intervenant(s) :
Michael Hochberg
Oliver Kaltz
Claire Gougat-Barbera

Institut des Sciences de l'Evolution de Montpelier (ISEM)
 CNRS / Université de Montpellier / IRD / EPHE

Raphaël Chiron
CHU de Montpellier
Journaliste(s) :

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