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Lumière sur Becquerel
Troisième source renouvelable d’électricité derrière l’hydraulique et l’éolien, le photovoltaïque est en train de se tailler une place au soleil dans notre pays. Bien sûr, la France reste loin derrière la Chine et fait encore pâle figure face à certains de ses partenaires européens. Mais nous pourrions vite sortir de l’ombre : portée par une recherche de pointe, dont vous avez déjà pu apprécier certains des fleurons tels que l’Institut photovoltaïque d’Île-de-France dans CNRS Le journal, et par un tissu industriel dynamique, cette énergie connaît un bel envol depuis plusieurs années. Elle pourrait ainsi passer de moins de 10 Gigawatts (GW) de puissance aujourd’hui, à plus de 40 GW avant la fin de la prochaine décennie. Il n’était que temps, quand on sait qu’elle repose sur une découverte bien de chez nous !
Dans la famille Becquerel, je voudrais… Edmond !
La découverte de l’effet photovoltaïque, c’est comme un jeu de sept familles dans lequel une carte est souvent restée dans l’oubli. Chez les Becquerel, on se souvient volontiers de l’aïeul, Antoine (1788-1878), qui, outre ses travaux pionniers dans des domaines aussi divers que la physique, la chimie ou la géologie, s’est illustré par des faits d’armes qui lui ont valu plusieurs citations à l’ordre du jour de la Grande Armée. Plus souvent encore, on songe à Henri (1852-1908), le découvreur en 1896 des « rayons uraniques » – c’est-à-dire de la radioactivité – et le lauréat, avec Marie et Pierre Curie, du prix Nobel de physique en 1903. Et, plus près de nous enfin, il y a Jean (1878-1953), un spécialiste reconnu des propriétés optiques et magnétiques des cristaux.
Edmond (1820-1891), lui, manque souvent à l’appel, comme broyé entre la gloire de son père Antoine et celle de son fils Henri. Il faut dire que les intéressés eux-mêmes se sont donné la peine de brouiller les cartes. D’une part, ils ont travaillé main dans la main d’une génération à l’autre – Antoine initie Edmond à la recherche sur l’électricité et partage la plupart de ses publications, tandis qu’à son tour Edmond encourage Henri dans l’étude des sels phosphorescents, dont celui d’uranium. D’autre part, les Becquerel ont occupé la même chaire de physique du Muséum national d’histoire naturelle, transmise de père en fils des années 1830 à la Seconde Guerre mondiale… un cas flagrant de népotisme qui se serait peut-être perpétué si Jean ne s’était pas éteint sans descendance en 1953 !
Le père de l’effet photovoltaïque
Toujours est-il que dans cet écheveau familial, un élément est avéré : si Edmond est bel et bien le fils de son père et le père de son fils, ce n’est ni son père, ni son fils – et encore moins son petit-fils ! – mais lui, sans aucun doute possible, le père de l’effet photovoltaïque. Le 4 novembre 1839, alors qu’il n’est encore que le tout jeune « aide naturaliste » d’Antoine au Muséum, il présente à l’Académie des sciences un mémoire « sur les effets électriques produits sous l’influence des rayons solaires ». Il y constate en effet que « des rayons qui accompagnent les rayons les plus réfrangibles de la lumière solaire, font éprouver à des lames métalliques plongées dans un liquide, une action telle, qu’il en résulte des effets électriques auxquels on ne peut attribuer une origine calorifique ».
Évidemment, les experts ne manqueront pas de souligner qu’on est loin des cellules photovoltaïques telles qu’on les connaît aujourd’hui. Le phénomène observé par Edmond, lié à ceux mis en œuvre pour la photographie argentique qu’il a également étudiée, relève de la chimie et de l’électrochimie. Il provient de la transformation de la matière qui s’opère sous l’effet des rayons solaires au contact de liquides. Et le chemin sera encore long jusqu’à son application à des dispositifs solides à semi-conducteurs, puis la fabrication des premiers panneaux au silicium en 1954. Mais l’aventure est en marche, et son initiateur méritait bien d’être remis en pleine lumière, à l’occasion du 200e anniversaire de sa naissance. ♦
Les points de vue, les opinions et les analyses publiés dans cette rubrique n’engagent que leur auteur. Ils ne sauraient constituer une quelconque position du CNRS.
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