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Un jour avec Louise-Anne Cariou, ingénieure prévention
9 h 30 : test de la qualité de l’air
C’est au pas de course que la journée commence pour Louise-Anne Cariou, ingénieure prévention et sécurité de l’Institut des sciences chimiques de Rennes1. Dans ce laboratoire de pointe, 478 personnes innovent dans tous les domaines de la chimie, de la catalyse aux matériaux électroactifs tels que ceux utilisés dans les LED.
Ce matin, elle doit aller tester l’efficacité du nouveau système de ventilation des laboratoires de chimie organique, s’assurer que les composés organiques volatils ou COV2, qui s’évaporent lors des synthèses chimiques, sont efficacement évacués. Postée au dernier étage du bâtiment, à proximité du toit, Louise-Anne vérifie que les fumigènes libérés sous les « sorbonnes » – ces hottes de laboratoire protégées par des parois – sont bien aspirés par les cheminées d’extraction et qu’aucune trace de COV ne subsiste dans les locaux. Des filtres à la sortie des sorbonnes permettent d'avoir des rejets extérieurs conformes à la législation, sans risque pour l'environnement. « La qualité de l’air est une priorité, car les COV peuvent irriter les muqueuses, provoquer des nausées ou des maux de tête, explique la jeune femme. Certaines personnes sont particulièrement sensibles à ces produits. »
11 heures : suivi de chantier
Les travaux de modernisation des cheminées d’extraction et du système aéraulique ne font que commencer. Louise-Anne Cariou, qui jongle avec les codes du travail, de la santé publique et de l’environnement, doit aller annoncer aux assistants de prévention – des personnels qui l’épaulent dans sa mission –, la fermeture de certains bureaux et salles d’expériences d’une équipe de recherche. C’est avec une bonne dose de diplomatie, et des solutions en poche, qu’elle leur expose le planning. « Le dialogue est pour moi essentiel, souligne-t-elle, et les gens sont ici très conscients que l’on agit pour leur santé et la qualité de leur environnement. Plus de 80 personnes sont d’ailleurs impliquées activement sur les questions de sécurité. » Demain, c’est avec l’équipe de chantier qu’elle doit négocier.
13 heures : chasse aux douleurs
Avant de redescendre à son bureau, Louise-Anne pousse la porte de l’atelier de l’un des trois souffleurs de verre du laboratoire, qui conçoivent et réalisent des pièces sur mesure pour les expérimentations des chercheurs. Il y a encore quelques mois, ces derniers se plaignaient de douleurs articulaires et de maux de tête récurrents. Pour mieux comprendre l’origine du problème et faire les aménagements pertinents, l’ingénieure sécurité n’a pas hésité à chausser des lunettes bleues et à souffler des pièces de verre durant une semaine. Conclusion : c’est la position, le port de charge et la répétitivité des mouvements qui sont en cause. Aujourd’hui, grâce à la ténacité de Louise-Anne, de la médecine de prévention et des tutelles, deux exosquelettes ont été installés dans les ateliers pour soutenir le bras des souffleurs de verre et accompagner tous leurs gestes. « Depuis, les douleurs articulaires sont parties ! » se réjouit-elle.
14 h 30 : expertise régionale
Pas le temps de se poser. Louise-Anne Cariou a rendez-vous sur le site de l’École nationale supérieure de chimie de Rennes – qui héberge, à quelques bâtiments de distance, des équipes de l’unité – pour y livrer des flacons d’effluents prélevés dans l’environnement d'un autre laboratoire breton. Louise-Anne souhaite s’assurer qu’aucune trace de formaldéhyde (formol), utilisé notamment par les chercheurs de ce laboratoire pour conserver des plantes, ne se retrouve dans le milieu et mettre en place, si nécessaire, des mesures de prévention. Cette fois-ci, c’est pour la délégation régionale CNRS Bretagne et Pays de la Loire qu’elle intervient. Parallèlement à l’Institut, la jeune femme consacre en effet 20 % de son temps à la région, lui apportant son expertise en risques chimiques mais aussi en radioprotection.
17 heures : mission recyclage
La journée se calme enfin… ou presque. Un collègue passe une tête dans son bureau pour lui demander comment transporter des produits chimiques synthétisés en laboratoire vers Toulouse. Louise-Anne l’aiguille vers l’unité Ulisse du CNRS, spécialisée dans le transport de matières dangereuses, et peut désormais s’atteler à la rédaction de ses comptes-rendus. Elle doit travailler sur la gestion des déchets du laboratoire avec le groupe de travail RForce43, qu’elle a mis en place notamment avec son collègue Gilles Alcaraz, référent « déchets chimiques » du laboratoire. « On essaye par exemple de recycler certains produits pour limiter leur impact sur l’environnement. On décontamine également du matériel électrique et électronique afin qu’il puisse être pris en charge par la filière classique de traitement des déchets, détaille Louise-Anne Cariou. Cela limite les pollutions sur le milieu, mais aussi les coûts ! »
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Auteur
Laurianne Geffroy est journaliste scientifique et auteur depuis 2000. Elle réalise, au sein de Ya+K productions, des reportages pour les sites Internet du Cnes, de l’Inserm et d’Universcience.tv, et collabore régulièrement à des ouvrages scientifiques édités par Le Cherche Midi.
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