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Le bâtiment intelligent, clé de la transition énergétique
Une fois par mois, retrouvez sur notre site les Inédits du CNRS, des analyses scientifiques originales publiées en partenariat avec Libération.
Face à l’urgence climatique, la COP21 vient de rappeler la nécessité absolue de s’engager plus avant dans une transition depuis les énergies fossiles vers les énergies renouvelables. Dans ce contexte, les progrès du génie électrique s’avèrent cruciaux pour répondre aux problèmes posés par l’exploitation des sources renouvelables mais intermittentes. Cela grâce au smart grid : un réseau « intelligent » de distribution d’énergie dont les flux, qui consistent aujourd’hui en un aller simple de la centrale à la prise électrique, seront décentralisés et optimisés grâce au big data.
Les bâtiments, plus grosse charge du réseau électrique
Reprenant cette idée de smart grid à l’échelle du microréseau d’un bâtiment, notre laboratoire, G2ELab1, s’est lancé, il y a peu, dans le développement et l’expérimentation d’un bâtiment intelligent (ou smart building) à Grenoble. Profitant de deux révolutions en cours – celle des objets connectés et celle du big data –, nous avons conçu un bâtiment capable de gérer le stockage et la répartition de l’énergie, mais aussi un approvisionnement provenant de nombreuses sources. Pourquoi avoir centré notre approche sur les bâtiments plutôt que sur le réseau de distribution qui les englobera ? Tout simplement parce qu’avec 66 % de la consommation électrique, les bâtiments constituent la plus grosse charge du réseau électrique. Rappelons aussi que ce secteur représente 44 % de la consommation d’énergie primaire, générant 20 % des émissions de gaz à effets de serre. Les futurs bâtiments dits à énergie positive constitueront à l’avenir un gisement énorme en termes de production d’énergie renouvelable.
constituera
le pilier d’un futur
réseau énergétique
intelligent
offrant des services
de production,
de stockage et de
délestage.
Un récent rapport de l’Ademe2 montre la faisabilité d’un mix électrique à 100 % de sources renouvelables. Son scénario le plus acceptable socialement estime que la plus grosse capacité de production d’énergie proviendrait du parc photovoltaïque installé sur les toits : 34,8 % de la capacité de production électrique (68,3 gigawatts sur les 196 nécessaires) serait ainsi constituée par le solaire « résidentiel ». D’ores et déjà validé par la réglementation thermique 2020, le concept de bâtiment à énergie positive est au cœur de plusieurs projets rassemblant industriels et chercheurs. Le bâtiment du futur couvrira ainsi ses besoins par sa propre production en énergie renouvelable, mais il sera, en plus, en mesure d’alimenter d’autres secteurs, comme les transports, en permettant de recharger les batteries des véhicules électriques.
À ce titre, le smart building constituera le pilier d’un futur réseau énergétique intelligent offrant des services de production, de stockage, de délestage, voire d’effacement de certaines parties du réseau en cas de pic de consommation. Les acteurs traditionnels du secteur de l’énergie ont d’ailleurs déjà manifesté leur intérêt pour le concept en contribuant à des projets tests. Notamment le projet Greenlys, dans lequel les usagers acceptent que leur chauffage puisse être arrêté, une fois par jour pendant au maximum une heure, permettant ainsi aux opérateurs de lisser les pics de consommation d’énergie à l’échelle du réseau.
Les usagers acteurs du système
Le concept de bâtiment intelligent est de facto lié à celui de « consom’acteur ». Ce terme désigne l’usager qui, par son comportement, détient la clé d’une consommation et d’un accès à l’énergie compatibles avec les rythmes de production des énergies renouvelables et intermittentes ; comme différer le lancement d’une lessive jusqu’au prochain pic de production d’électricité éolienne (ou solaire). Un usager qui, par surcroît, aura la capacité d’influer sur la structure économique et industrielle du secteur de la production et de la distribution d’énergie.
de bâtiment
intelligent est
de facto lié à celui de consom’acteur.
C’est, en tout cas, ce qu’anticipe l’économiste américain Jeremy Rifkin dans le cadre d’une IIIe révolution industrielle qui verra ces consom’acteurs se regrouper pour atteindre la taille critique leur permettant de devenir des acteurs collaboratifs de production, de stockage et de consommation d’énergie.
L’étude des smart buildings constitue un enjeu de taille. Celle-ci doit aboutir à des développements scientifiques permettant la conception et la supervision de microréseaux de distribution, la modélisation et l’optimisation des flux énergétiques, ainsi que le développement de composants de production et de stockage. Mais, surtout, l’on comprend que cette recherche ne peut se faire sans prendre en compte l’usager dans toutes ses dimensions, et donc aussi toute sa complexité. Un défi scientifique majeur !
Nous testons ainsi le concept de living lab dans le cadre d’une plateforme intégrée aux locaux du bâtiment GreEn-ER, lui-même exemplaire d’un point de vue énergétique. Il disposera de ses propres moyens de production, de stockage et de supervision ; le tout sur une superficie de plus de 600 m2. Le living lab permettra, via une multitude de capteurs et d’appareils connectés (tablettes, téléphones, montres, etc.), d’analyser le comportement des usagers et les faire participer à des expérimentations où leur confort physiologique et psychologique pourra être évalué. L’idéal visé est que l’usager soit tout autant utilisateur que concepteur. Les bâtiments et leurs occupants, par leur poids dans la consommation énergétique, ont et auront un rôle primordial dans toute stratégie de transition énergétique.
Les points de vue, les opinions et les analyses publiés dans cette rubrique n’engagent que leur auteur. Ils ne sauraient constituer une quelconque position du CNRS.
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"Le living lab permettra, via
Georges Sabellicus le 17 Janvier 2016 à 18h56Vous attirez l'attention sur
Wurtz Frédéric le 18 Janvier 2016 à 12h14