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Nous sommes à Carthagène, au Sud-Est de l’Espagne. Cette équipe de chercheur.e.s embarque son matériel à bord d’une goélette pour une mission un peu particulière : tenter de mieux comprendre la communication chez les globicéphales, des cétacés de la famille des dauphins.
Aujourd’hui ils partent retrouver une population de globicéphales qui vit en Méditerranée et qui est suivie, scientifiquement, depuis de nombreuses années.
ITV Phil Verborgh, biologiste
On a un grand catalogue de photo-identification ; donc la photo-identification, c’est à partir d’une photo de la dorsale, où ils vont avoir des encoches à des endroits différents, plus ou moins profondes, qui vont permettre d’identifier chaque individu ; et là sur tout le sud de l’Espagne, on a près de 1500 individus qui sont identifiés ; donc pratiquement la moitié de la population.
Comme tous les cétacés, ces animaux étaient encore terrestres il y a 50 millions d’années. Leurs narines ont depuis migré vers le haut de leur crâne en formant ce qui est appelé “l’évent”, et qui leur sert pour respirer à la surface.
Ces modifications morphologiques, selon certains chercheurs, auraient mené à la disparition des sens du goût et de l’odorat chez les cétacés, qui auraient alors privilégié d’autres sens pour communiquer...
ITV Aurélie Célerier, biologiste
La plupart des études de communication chez les cétacés se focalisent sur l’acoustique - et toutes les autres formes de communication et notamment l’olfaction et la gustation ne sont pas étudiées...
Mais que reste-t’il vraiment du sens de l’odorat chez ces mammifères marins ?
Pour tenter de répondre à cette question, les chercheurs ont mis en place un protocole qui repose sur un “appât” olfactif, et une technique de prise d’images.
L’appât olfactif qu’ils placent dans l’eau, c’est du diméthyl sulfure ou DMS, - une molécule volatile odorante présente naturellement à la surface des océans et notamment là où se concentre une forte production biologique - dans des zones où les globicéphales pourraient potentiellement trouver à manger. Les chercheurs alternent entre le DMS et une huile végétale neutre, qu’ils appellent “contrôle” et qui présente toutes les caractéristiques visuelles du DMS sans en présenter l’odeur.
Grâce à un drone, les scientifiques peuvent alors suivre et enregistrer les déplacements des globicéphales à distance sans les perturber.
Pour voir ce qui se passe sous la surface, les chercheurs disposent également de caméras sous marines et d’hydrophones, des micros permettant d’enregistrer l’activité acoustique des globicéphales sous l’eau.
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“Ils vont droit dessus ! Ils vont le manger ! Ils sont à moins de 1 mètre ! Ils sont tout autour ! Il y en a un qui est tout près, les autres restent à distance… là on va voir avec les caméras sous-marines…”
VOIR SI ON PEUT MONTRER À L’IMAGE QUE LES CHERCHEURS SONT BIEN À 300M
C’est ensuite au laboratoire du Centre d’Ecologie Fonctionelle et Evolutive de Montpellier que toutes ces données sont analysées
ITV Bertrand Bouchard, biologiste
Donc ici on voit le flotteur dans lequel on a déversé le stimulus olfactif donc le DMS qui est dans une tache d’huile ; d’ailleurs on devine un peu la tache d’huile qui est en surface ; la pellicule huileuse qui va se répandre progressivement.
Ici on a un cercle de 20 mètres autour du stimulus, et ici, un cercle de 100 mètres. Donc on les suit sur la séquence d’images et, par exemple, ce groupe, les points verts sont lorsque les animaux sont sous l’eau, et les points rouges c’est lorsqu’ils apparaissent en surface.
Ici on a un animal qui s’est joint au groupe et après être resté à peu près deux minutes au contact avec le stimulus, les animaux repartent et reprennent leur trajectoire initiale.
Donc ici, ces résultats corroborent l’impression qu’on avait eu visuellement par rapport aux images de drone, où on voit que les animaux ont modifié leur trajectoire pour se rapprocher du flotteur, plus lorsqu’il y avait, dans ce flotteur, un stimulus olfactif, ici le DMS.
Les animaux ont bien réagi aux expériences. Ils devraient donc
Logiquement, disposer de cellules olfactives. Ce sont des analyses biologiques réalisées sur des animaux morts échoués qui permettent de les localiser et les identifier.
ITV Thomas Lisney, biologiste
Ce sont des images de tissus des voies nasales de dauphin que nous regardons ici. Elles ont été produites par ce microscope, et les différentes couleurs montrent différentes choses. Commençons par le bleu qui nous permet de voir différents types de cellules. Le vert, lui, révèle les récepteurs olfactifs et l’orange marque le chevauchement des cellules nerveuses marquées en rouge et les récepteurs olfactifs marqués en vert. Ils sont positionnés au même endroit ce qui veut dire qu’il s’agit probablement de cellules nerveuses portant des récepteurs olfactifs .
C’est une recherche très novatrice, et enthousiasmante qui suggère fortement que les voies nasales de ce dauphin portent des cellules nerveuses olfactives. Ca semble confirmer que ces animaux ont bien un sens de l’olfaction et qu’ils pourraient l’utiliser potentiellement dans leur environnement naturel notamment pour trouver leur nourriture.
La recherche fondamentale continue sur les globicéphales et sur d’autres cétacés dans le monde pour comprendre l’évolution de leurs capacités sensorielles. Mais ces premiers résultats permettent d’envisager à plus long terme la création d’outils qui pourraient les attirer loin des zones de pêche ou de trafic maritime
et ainsi contribuer à la préservation de ces animaux emblématiques et mondialement menacés…
Les cétacés ont-ils gardé le sens de l'odorat ?
En s’adaptant à la vie marine, les cétacés ont-ils perdu le sens de l’olfaction au profit d’une communication acoustique ? Cette vidéo proposée en partenariat avec Le Monde suit, au large de l’Espagne, des chercheurs qui tentent de répondre à cette question en étudiant un groupe de globicéphales, des cétacés de la famille des dauphins.
Bertrand Bouchard
Thomas Lisney
Equipe Ecologie Comportementale,
CEFE (Centre d'Ecologie Fonctionnelle et Evolutive)
CNRS / Université de Montpellier
Philippe Verborgh
CIRCE (Conservation, Information and Research on Cetaceans)
Universitad de Las Palmas de Gran Canaria
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